L’écrivain et polémiste français était invité à Genève mercredi soir. Face à l’avocat genevois Marc Bonnant, il s’est illustré par ses saillies contre la déconstruction de l’histoire de France.
On aurait pu s’attendre au pire – caillassages d’extrême gauche, dérapages racistes ou plaisanteries déplacées sur les «minorités visibles». Mais le dîner-débat qui a réuni Eric Zemmour, Marc Bonnant et une centaine de convives, mercredi soir à Genève, s’est résumé à un exposé courtois sur l’histoire de France et le démontage des mythes nationaux par les historiens d’aujourd’hui.
«On invente un passé pour correspondre à la nouvelle population» – issue en partie de l’immigration –, a critiqué Eric Zemmour, auteur controversé d’ouvrages comme Le suicide français et Destin français (parus chez Albin Michel).
« Même la Révolution française est mal vue car trop blanche, trop masculine, on a guillotiné des femmes »
Exemple avec la bataille de Poitiers en 732, qui vit Charles Martel écraser les armées arabes. Un acte prétendument fondateur de la nation française et de l’Europe chrétienne, dont l’importance est aujourd’hui relativisée. «Il faut dire que ce n’est rien parce que justement c’est tout, c’est essentiel», dénonce Eric Zemmour. Qui ose cet étonnant paradoxe: c’est à cause de l’islam que l’idée même d’Europe a pu naître
Une vague qui fait émerger l’Europe
Avant la conquête arabe en effet, l’homme du VIIIe siècle vit encore dans la représentation antique du monde, centrée autour de la Méditerranée. Il n’a pas compris que l’Empire romain qui englobait ses pourtours est mort à jamais. C’est seulement quand la vague musulmane emporte sa rive sud que l’Europe peut émerger – une Europe forcément chrétienne, affirme Eric Zemmour.
Selon l’écrivain, «même la Révolution française est aujourd’hui mal vue» par un révisionnisme historique voué au politiquement correct. Car elle est «trop blanche, trop masculine, on a guillotiné des femmes», persifle-t-il.
Evangile monstrueux
La France d’aujourd’hui, complète Marc Bonnant, vit sous l’emprise d’un «évangile monstrueux»: «On est obligé d’aimer l’autre [l’étranger, le migrant], la colère est interdite.»
Travaillée par la «haine de soi» et la «détestation de ce qu’on est devenu» depuis la défaite de Napoléon en 1815, conclut Eric Zemmour, la France oscillerait depuis d’une guerre civile à l’autre: la Commune, les résistants contre les collabos, l’Algérie… Jusqu’à la «guerre des mots» qui opposerait aujourd’hui ce chantre de l’identité française à ses détracteurs.
Sur les contours d’une inéluctable guerre civile future (dont on comprend vaguement qu’elle opposerait les quartiers à forte densité migratoire au reste du pays), et surtout les moyens de l’empêcher, les deux orateurs se sont montrés très vagues. Apparemment comblé par le débat, le public réuni par l’association Convergences – assez mélangé et pas forcément très politisé – a dû, sur ce point, repartir perplexe, dans la nuit.