Le candidat du pouvoir à l’élection présidentielle en Mauritanie, Mohamed ould Ghazouani, a été élu avec 52% des suffrages au premier tour, selon les résultats provisoires annoncés dimanche soir par la Commission électorale.
Dès dimanche matin, Mohamed ould Ghazouani avait revendiqué la victoire, provoquant l’indignation des candidats de l’opposition qui avaient alors appelé leurs partisans à protester dans le cadre de la loi. Des débordement ont été enregistrés à Nouakchott dimanche en fin d’après-midi, avant que la Céni annonce les résultats provisoires. Quelques blessés sont à déplorer parmi les manifestants.
Dimanche soir, la Commission nationale électorale indépendante (Céni) a finalement déclaré vainqueur Mohamed ould Ghazouani, avec 52,01% des voix sur l’ensemble des bureaux de vote. Le candidat du pouvoir est suivi par quatre opposants, dont le militant anti-esclavagiste Biram Dah Abeid, qui totalise 18,58% des suffrages, et l’ancien Premier ministre Sidi Mohamed Ould Boubacar avec 17,87% des voix. Les autres candidats n’atteignent pas les 10%. Ces résultats provisoires doivent encore être transmis pour validation au Conseil constitutionnel après examen d’éventuels recours.
« Afin de garantir la transparence de ces élections, chaque candidat a pu déléguer des représentants pour accompagner les différentes étapes du processus, que ce soit dans les bureaux de vote pour suivre les opérations de vote et de dépouillement ou au siège de la Commission électorale pour la consolidation des résultats », a rappelé le président de la Céni Mohamed Vall Ould Bellal.
En dépit des critiques des candidats de l’opposition qui n’ont cessé de dénoncer la composition et la proximité de la Commission électorale avec le général Ghazouani, le président de l’institution a précisé que le défi de l’organisation avait été relevé, malgré des imperfections.
Le dauphin de Mohamed ould Abdel Aziz
Un général va donc succéder à un autre général à la tête de la Mauritanie. Crâne rasé et fines lunettes sur le nez, c’est un homme effacé qui arrive à la tête du pouvoir. Militaire de carrière, il est affecté au deuxième bureau de l’armée chargé du renseignement militaire quand il participe au coup d’État de 2005 contre le président Ould Taya. Discret, il fait alors partie de ceux qui comptent dans la junte.
À ses côtés, Mohamed ould Abdel Aziz rencontré à l’académie militaire de Meknès au Maroc au tout début des années 1980. C’est avec lui qu’il renverse encore en 2008 Sidi ould cheikh Abdallahi, le civil qu’ils avaient porté au pouvoir un an plus tôt.
Nommé chef d’état-major après ce nouveau coup d’État, avant de passer quelques mois au ministère de la Défense, Mohamed ould Ghazouani a évolué depuis dans l’ombre du président sortant. Il jouit d’une bonne réputation au sein de l’armée et s’est imposé comme un homme clé du dispositif sécuritaire.
Issu d’une famille maraboutique originaire du centre du pays, il est décrit par ceux qui l’ont côtoyé comme « un homme fin, ingénieux et courtois ». « Un militaire qui sait où se trouve le pouvoir réel et qui n’a jamais cherché la lumière de la présidence », confie un diplomate étranger. Un homme dont le style tranchera immanquablement avec celui de son prédécesseur.
Continuité ou alternance ?
Il y a quelques mois, Mohamed ould Ghazouani, 62 ans, assurait ne pas avoir l’intention de se présenter, et affichait son soutien indéfectible au président sortant, son compagnon de route depuis des années. Finalement sa candidature s’est imposée et il a bénéficié de tout l’appui officiel nécessaire pour faire campagne : celui de plusieurs ministres engagés à ses côtés, et bien sûr celui de Mohamed ould Abdel Aziz, qui s’affichait encore avec lui dimanche matin pour revendiquer la victoire avant même l’annonce des résultats.
Faire plus, voire mieux, que Mohamed ould Abdel Aziz et continuer son œuvre, c’est ce qu’il a habilement promis durant la campagne. Incarnera-t-il dans les faits la continuité ou une forme d’alternance ? La question reste entière à ce stade. Sera-t-il loyal à Mohamed ould Abdel Aziz maintenant qu’il occupe le fauteuil présidentiel ou l’attelage qu’ils ont formé va-t-il se disloquer ? « Mohamed ould Ghazouani n’est pas du genre à remettre en cause les acquis ni à menacer les intérêts des uns et des autres », confie un ancien diplomate, avant d’ajouter : « Ce n’est pas non plus un homme de paille. Il ne se laissera jamais marcher sur les pieds. »
Celui qui fut son conseiller politique durant la campagne, Mohamed Salem Ould Merzoug, s’est félicité de cette victoire.