Hervé Renard est le « sorcier blanc » qui rêve d’une troisième consécration à la compétition phare du football africain: la CAN.
Le Maroc va-t-il sourire à Hervé Renard comme la Zambie et la Côte d’Ivoire l’ont déjà fait avec lui dans cette compétition majeure du footbal africain ? La question est posée par le Point.
La chemise blanc immaculé aux plis parfaits n’aurait pas suffi à lui attribuer le qualificatif de « sorcier blanc », mais elle a tout de même contribué au mythe d’Hervé Renard, à partir du moment où le sélectionneur a commencé à gagner. En 2012, l’Afrique et la France découvrent cet entraîneur atypique, visage bronzé, corps musclé, passionné par sa quête de sélectionneur : remporter la Coupe d’Afrique. En vérité, le destin de Renard s’est déclenché 11 ans plus tôt, à Draguignan, lorsque l’ancien défenseur de l’AS Cannes (1 seul match en D1) a rencontré Claude Leroy. Séduit par cette rencontre, l’entraîneur-voyageur prend le jeune technicien sous son aile et va lui faire découvrir le championnat chinois, la quatrième division anglaise à Cambridge, puis le continent africain. Première CAN en 2008, Leroy dirige le Ghana, Renard est son adjoint. « Il avait une telle envie de montrer des choses et de bosser que j’ai vraiment aimé ça », racontait Claude Leroy au Parisien en 2014. Renard file ensuite en Zambie, où tout va s’accélérer.
Après une première CAN réussie en tant que sélectionneur en chef (quarts de finale en 2010, une première depuis 14 ans pour la Zambie), Renard décide d’aller voir du pays, et entraîne successivement l’Angola et l’USM Alger. Mais n’hésite pas une seconde lorsque la Zambie le rappelle pour la Coupe d’Afrique 2012, celle qui le révélera aux yeux du grand public. L’entraîneur savoyard désinhibe son groupe, où l’on ne compte aucune star. Les « chipolopolos » (boulets de cuivre) collectionnent les scalps au fil de la compétition : le Sénégal de Mamadou Niang et Souleymane Diawara, le Ghana des frères Ayew, et enfin, la Côte d’Ivoire de Didier Drogba et Yaya Touré, battue aux tirs au but 8 à 7.
Renard et les pénalties, y aurait-on cru chez Netflix ?
Au bout de cette séance de tirs au but aussi surréaliste qu’irrespirable, Hervé Renard et les Zambiens font pleurer les Ivoiriens. Il faudra attendre 3 ans pour qu’Abidjan retrouve le sourire : en 2015, la Côte d’Ivoire soulève la deuxième coupe d’Afrique de son histoire (après 1992), grâce au travail… d’Hervé Renard, qui devient le premier entraîneur de l’histoire à remporter la CAN avec deux sélections différentes. Déjà mieux que son mentor Claude Leroy, à moins de 50 ans !
On peut évidemment poser deux calques différents sur les triomphes du technicien français, soit en écrivant que tout lui réussit, soit en se souvenant qu’à deux tirs au but près, son palmarès continental serait encore vierge. Car le 8 février 2015, c’est encore une fois aux tirs au but que le sort bascule du côté d’Hervé Renard. Et encore au bout d’un scénario hallucinant : si les CAN de Renard étaient une série Netflix, on trouverait des critiques pour écrire que le scénariste a un peu exagéré. Et pourtant ! La Côte d’Ivoire remporte la séance 9-8 face au Ghana, alors que les Éléphants Bony et Tallo avaient loupé les deux premiers pénalties.
Renard a transformé la Côte d’Ivoire
Avant d’en arriver là, Hervé Renard a transformé le style de jeu ivoirien, devenu moins spectaculaire mais redoutablement efficace. Surtout, il est parvenu à bâtir un collectif fort et soudé, après le départ en retraite internationale de Didier Drogba, le meilleur joueur d’une génération dorée qui n’avait jamais réussi à gagner. Ironie du sort ou lien de cause à effet, c’est juste après le départ de la star que la Côte d’Ivoire a gagné. Sur les réseaux sociaux, Drogba avait donné son avis sur la question, juste avant la finale : « Déçu de ne pas faire partie de cette aventure mais content et soulagé d’avoir arrêté à temps pour que vous puissiez grandir ! Faites de ce jour votre jour, votre victoire, et le reste sera historique. »
Après deux courts passages en Ligue 1 (Sochaux, 2013-14, et Lille, 2015), Hervé Renard rêve désormais de marquer encore un peu plus l’histoire du football africain. Sélectionneur du Maroc, l’un des favoris de la CAN avec Hakim Ziyech (Ajax Amsterdam), il pourrait remporter une troisième CAN avec trois pays différents. « Nous avons de l’ambition et une bonne équipe, a déclaré Renard. Nous espérons aller très loin dans ce tournoi, même si nous avons un groupe difficile. » Renard dirige le Maroc depuis 3 ans. Malgré une bonne première CAN (quarts de finale), les Lions de l’Atlas ont raté leur coupe du monde, l’été dernier (dernier de leur poule avec 1 point, derrière l’Iran). À la tête d’une génération talentueuse, le « sorcier blanc » à la chemise blanche est attendu au tournant.