Le 9 février 2020, les Camerounais se rendront aux urnes pour élire leurs députés et leurs maires. Maurice Kamto n’en sera pas. Le principal opposant du pays a appelé, à quelques heures de la clôture du dépôt des candidatures, au boycott des élections. Il a souhaité que « tous les partis politiques de l’opposition, l’ensemble de la société civile, les organisations et autres forces religieuses » suivent son appel, effectué depuis le siège de son parti. La raison ? Les violences meurtrières régulières, qui sévissent dans certaines régions du pays. Pour le dirigeant du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), le scrutin « ne ramènera pas la paix dans notre pays ».
Depuis deux ans, le nord-ouest et le sud-ouest du Cameroun – qui compte pour 16 % de la population camerounaise – sont le théâtre d’un conflit qui oppose indépendantistes anglophones à l’armée, et qui aurait fait près de 3 000 morts, d’après des ONG. « Organiser des élections au Cameroun aujourd’hui, qui plus est des élections locales, sans avoir rétabli la paix dans ces régions […] c’est donner le message que (les) populations (de ces régions) ne sont pas des Camerounais et, ce faisant, consacrer la partition de fait du pays », a déclaré Maurice Kamto.
Vers « une nouvelle crise post-électorale » ?
Autre point de discorde pour l’ancien rival de Paul Biya à l’élection présidentielle, l’absence d’une réforme du code électoral. « Avec le système actuel, les mêmes causes produiront inévitablement les mêmes effets à savoir : fraudes massives, vol des résultats et nouvelle crise post-électorale », a-t-il déploré. La réélection en octobre 2018 du président sortant, 86 ans, dont 37 au pouvoir, avait déclenché une grave crise politique. L’opposition, et notamment le camp de Maurice Kamto, arrivé en deuxième position, avait contesté cette victoire. À l’issue d’une des marches pacifiques organisées par le MRC, l’opposant, ainsi qu’une dizaine de ses partisans avaient été arrêtés. Huit mois plus tard, il retrouvait la liberté, les pressions de la France et des États-Unis notamment ayant fait leur effet.
Pour le scrutin de février, le MRC s’était pourtant préparé. Ses dirigeants avait mis en place une commission chargée des investitures pour ce double scrutin. Avant, donc, de faire volte-face. Le parti « était persuadé que dans un sursaut patriotique, le régime en place prendrait en compte les exigences légitimes des Camerounais même à la dernière minute », a justifié Maurice Kamto. « Malheureusement, celui-ci s’est enfermé dans son mépris habituel. Le pouvoir illégitime n’entend même pas respecter un minimum de règles, qu’ils s’agissent de celles du Code électoral pourtant déjà très insatisfaisantes ou de celles régissant le fonctionnement de l’Administration publique. Le dispositif électoral actuel n’est rien d’autre qu’une souricière politique. »