Un tribunal tanzanien a refusé ce jeudi 02 janvier d’autoriser le journaliste d’investigation Erick Kabendera à rendre un dernier hommage à sa mère décédée deux jours plus tôt, arguant que cette décision ne relevait pas de sa compétence.
M. Kabendera a été inculpé en août de crimes économiques et blanchiment d’argent. Il est détenu depuis lors et son cas a été ajourné déjà 11 fois devant les tribunaux.Sa mère Verdiana Mujwahuzi est décédée mardi et une cérémonie funéraire est prévue vendredi à l’église catholique de Temeke, un quartier de Dar es Salaam.Les avocats du journaliste ont demandé à ce qu’il puisse y assister sous escorte, à constaté Afp. « Erick prenait soin en permanence de sa mère avant son arrestation. Il est donc important pour lui d’y assister », a justifié l’un de ses défenseurs, Jebra Kambole.Mais le procureur Wankyo Simon s’y est opposé, arguant que le tribunal n’avait pas le pouvoir d’accéder à cette demande. »Nous regrettons vraiment le décès de sa mère, mais il faut noter que ce tribunal n’a pas la compétence pour accorder cette autorisation, étant donné que les cas de crimes économiques sont entendus par la Haute cour », a-t-il fait valoir.Les dossiers pour crimes économiques sont portés devant la Haute cour, une fois que l’enquête a été achevée.M. Kabendera, dont la santé est précaire, est apparu en pleurs avant le début même de l’audience, pendant que les médias l’encadraient de près avec leurs caméras, et que ses amis et proches remplissaient la salle.A l’annonce par la juge Janeth Mtega du refus de la requête, certains membres de la famille du journaliste ont également fondu en pleurs et d’autres ont fait entendre leur mécontentement. Une prochaine audience est prévue le 13 janvier.L’arrestation et les poursuites engagées contre M. Kabendera, journaliste indépendant réputé, sont pour beaucoup d’observateurs révélatrices de l’érosion de la liberté de la presse en Tanzanie depuis l’élection de M. Magufuli fin 2015.M. Kabendera travaille pour des médias nationaux et étrangers, comme The East African, dont le siège est au Kenya. Il a publié plusieurs analyses critiques sur la vie économique et politique dans la Tanzanie du président Magufuli.Les États-Unis et la Grande-Bretagne ont dénoncé la « lente érosion » des droits en Tanzanie, citant l’exemple de M. Kabendera.Reporters sans frontières (RSF), qui classe la Tanzanie de M. Magufuli parmi les régimes prédateurs de la liberté de la presse, et Amnesty International, entre autres, ont réclamé la libération de M. Kabendera.Depuis l’élection de M. Magufuli, des meetings de partis d’opposition ont été interdits, des responsables de l’opposition arrêtés et poursuivis, des journaux fermés et des journalistes et artistes molestés ou menacés de mort, après avoir critiqué le gouvernement.