Le Maroc n’a pas perdu de temps pour se positionner comme l’interlocuteur privilégié du Royaume-Uni en Afrique. À quelques jours de la concrétisation du Brexit entré en vigueur ce 31 janvier, Mohcine Jazouli, ministre délégué auprès du ministre marocain des Affaires étrangères en charge des Affaires africaines, s’est rendu à Londres. Objectif : participer aussi au Dialogue des affaires Maroc-Royaume-Uni organisé conjointement par le ministère marocain des Affaires étrangères et la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), en marge du sommet Afrique-Royaume-Uni sur l’investissement, en présence de l’Agence marocaine de développement des investissements et des exportations (AMDIE), du groupe OCP, de l’Agence marocaine pour l’énergie solaire (MASEN), de Tanger Med, de Casablanca Finance City (CFC), de la BMC… En face, le Royaume-Uni était représenté par son ministre d’État chargé du Commerce international, Conor Burns, ainsi que par son secrétaire d’État aux Affaires étrangères en charge de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, Andrew Murrisson. Preuve de l’intérêt conjugué des deux pays : la présence de 116 entreprises marocaines et de 225 britanniques qui ont scruté ensemble les opportunités d’échanges commerciaux et d’investissements.
Bénéficiant auprès de l’Union européenne d’un statut avancé lui permettant de bénéficier d’une coopération politique de haut niveau, le Maroc est parti pour jouer la carte de la meilleure proximité possible avec le Royaume-Uni désormais pays hors-Union européenne. Ayant saisi, au-delà du sommet Royaume-Uni-Afrique, combien le pays de Sa Gracieuse Majesté Elizabeth II tenait à se redéployer en Afrique où elle peut compter sur ses partenaires du Commonwealth, le Maroc a affirmé sa disponibilité et son ouverture à l’idée d’être, pour le Royaume-Uni, un « hub », un pivot et une porte d’entrée vers l’Afrique pour renforcer ses investissements et ses exportations vers le continent.
Pour le Maroc, la stratégie de la tête de pont multilatérale
Pour concrétiser cette approche, Mohcine Jazouli n’a pas hésité à déclarer que Rabat et Londres étaient en train « d’écrire une nouvelle page dans l’histoire » de leurs relations économiques. Mieux, que « le Royaume-Uni veut ériger le Maroc en une porte d’entrée vers l’Afrique après le Brexit ». Et d’expliciter l’intérêt et les objectifs de la rencontre dite Dialogue des affaires Maroc-Royaume-Uni : « faciliter les rencontres entre les hommes d’affaires marocains et britanniques », de quoi « monter les volumes d’affaires entre les deux pays aussi bien en termes d’échanges qu’en termes d’investissements ».
Les secteurs ciblés
« L’accent est mis sur le domaine financier dans la mesure où il y a de bonnes opérations qui ont été faites », a indiqué Mohcine Jazouli, qui a noté qu’« une banque marocaine a acheté pour la première fois une partie d’une banque britannique en Afrique, tandis qu’il existe un fonds britannique qui investit dans une banque marocaine pour se développer en Afrique ». Poursuivant son évocation des secteurs dans lesquels la coopération d’affaires peut être développée, le ministre marocain en charge des Affaires africaines n’a pas manqué de mettre en exergue d’autres secteurs qui intéressent déjà les hommes d’affaires britanniques. Ainsi de celui des énergies renouvelables où le volontarisme marocain est doublé de belles concrétisations sur le terrain à l’image de l’expérience réussie de l’Agence marocaine pour l’énergie solaire (MASEN). Avec la consolidation des acquis du Casablanca Finance City Authority qui a su attirer beaucoup de grands acteurs économiques comme Orange entre autres et de grandes institutions panafricaines comme le fonds Africa50, plateforme d’investissement dans les infrastructures fondée par la Banque africaine de développement et des États africains, le Maroc peut continuer à clamer haut et fort qu’il est un hub fiable pour développer des affaires avec toute l’Afrique. De quoi gonfler le niveau des échanges commerciaux annuels entre le Maroc et le Royaume-Uni chiffrés à plus de 18,3 milliards de dirhams, soit un peu moins de 4 % de l’ensemble des échanges du royaume avec l’Union européenne en 2018. Précision : le Maroc exporte pour environ 8 milliards de dirhams vers le Royaume-Uni, ce qui en fait son 7e client. Avec ses quelque 10 milliards de dirhams d’exportations vers le Maroc, le Royaume-Uni était en 2018 son 11e fournisseur dans le cadre de l’accord de libre-échange avec l’Union européenne. Un niveau que manifestement le Maroc souhaite améliorer.