Seuls ceux qui vivent dans une grotte depuis des années ou peut-être les Pygmées au fonds de la forêt équatoriale ne le savent pas : le Coronavirus a mis le monde à genoux. Obligeant les dirigeants à se battre et se débattre pour chacun tenter de relever son pays de ce bourbier intenable.
Luttant contre un ennemi redoutable et invisible qui se propage à une vitesse plus rapide qe l’habituelle rumeur africaine, le téléphone arabe et radio-trottoir réunis, tous les leaders maximo de la planète sont mis au défi de prendre fissa des mesures efficaces. Sous la pression de leurs citoyens hyperconnectés sur les réseaux sociaux et actifs sur tous les médias, ils sont soumis à une impitoyable obligation de résultats, en même temps que plongés dans un brouillard d’incertitudes. Dès lors, dépourvus de baguettes magiques, certains présidents, s’appuyant sur l’autorité médicale, prennent des mesures, se complaisent souvent dans le conformisme et s’escriment à un tâtonnement qui se veut rigoureux. D’autres versent dans la pure cocasserie.
La crise sanitaire donne l’occasion au Président du Sénégal, déjà chef d’un Exécutif fort sans Premier ministre, soupçonné de nourrir des fantasmes d’Omniprésident ayant subordonné la Justice, de maintenant mettre sous sa coupole le Législatif afin de gouverner à sa guise, par ordonnances. Pendant que médecins et chercheurs du monde sont dans une quête désespérée de la formule magique à prescrire pour exorciser ce tenace virus du corps de leurs patients, lui se sert de ses super pouvoirs pour extirper de sa cellule un détenu VIP, fragilisé par l’âge avancé, au prétexte de le protéger d’une maladie gérontophobe. Habré pour ne pas le nommer, l’ancien Président du Tchad, est autorisé à rentrer chez lui le temps que le coronavirus calme ses ardeurs, lui permettant ainsi de purger sa peine … à son domicile. La bienveillance à l’état pur !
Autre lieu, autre cocasserie présidentielle en temps de coronavirus : la Guinée. Chez les voisins, le Président-Professeur toujours sous l’emprise de l’ivresse du pouvoir après deux mandats, a dû accueillir la pandémie comme une aubaine pendant qu’il faisait face à des manifestations contre une éventuelle troisième candidature illégale. Les manifestants confinés de peur de choper ce coronavirus, il s’ouvre un boulevard à sa guise. Et comme en guise de consolation à ses empêcheurs de tourner en rond, il va lui aussi prendre des mesures » : les prochaines factures d’électricité et d’eau arrivées à échéance sont suspendues ! Sauf que dans le « château d’eau » de l’Afrique, l’eau coule pour peu d’habitants et l’électricité est un luxe pour une minorité. La décision du Président guinéen privilégie des déjà privilégiés.
Au Gabon où le pouvoir présidentiel est héréditaire, le Président a pour sa part créé un « fonds personnel » de 2,1 milliard de francs CFA pour « permettre aux Gabonais les plus vulnérables d’accéder aux soins médicaux, sans qu’ils aient à se préoccuper de l’aspect financier ». Sa subite générosité a le mérite de prouver qu’il est bien informé des conditions sanitaires peu reluisantes de ses compatriotes.
Pour autant, les Kenyans échangeraient ce généreux Président avec leur leader. Au tout début de la pandémie, alors que les aéroports se ferment et le trafic aérien ralentit, ceux d’entre eux qui ont eu la chance de regagner leur pays, soupçonnés d’être contaminés du virus, sont mis en quarantaine dans des hôtels… à leurs frais !
Guinée, Sénégal, bientôt la RDC: en cascade, tous les pays africains prennent des arrêtés ministériels pour obliger au port du masque dans les endroits fréquentés par le public, sous peine d’amende parfois (comme c’est le cas en Guinée).
Quant au port en public du masque chirurgical, dès l’apparition de cas de coronavirus en Afrique, par nos dirigeants, il laisse pour la postérité des images qui démentent à jamais l’adage selon lequel « seul le ridicule tue ». Le président ivoirien, Ouattara, tient des Conseil des ministres dont tous les participants portent un masque. Et se font photographier avec. Pour la pédagogie ? Le président malien IBK a lu son adresse télévisée à la Nation du 11 avril derrière un masque. Il n’en a pas moins appelé ses compatriotes à aller en masse voter pour les législatives de dimanche dernier. Les urnes électorales éloignent sans doute le Coronavirus …
Le président malgache, Andry Rajoelina, qui ne doit pas son surnom de « TGV » au hasard, a lui annoncé comme imminent un remède miracle qui « pourrait changer le cours de l’Histoire », composé à 80% de plantes médicinales malagasy.
Cette agitation laisse de marbre le presque nonagénaire (87 ans!) président camerounais, Paul Biya, qui, après les premiers cas de coronavirus déclarés dans son pays, est resté… 35 jours d’affilée sans apparaitre en public. Il est réapparu jeudi dernier, au 848ème cas de coronavirus au Cameroun, à la télévision et dans un tweet, où on le voit accorder une audience à l’ambassadeur de France au Cameroun, lequel portait un masque anticoronavirus. Biya n’en portait pas. Et s’il est un seul président africain dont on peut parier qu’on ne le verra pas porter un masque chirurgical en public, c’est bien Paul Biya!
Le si petit coronavirus aura déjà dévoilé l’impuissance des « hommes forts » de l’Afrique et autres puissants du monde qui, malgré leur peine, tire quelques satisfactions « triomphalisantes » de leurs mesures…qui pourraient les ériger en héros d’une histoire, la grande Histoire, en train de se faire sous nos yeux. On a tous hâte d’en connaître le fin mot, de cette drôle d’histoire de pandémie Covid-19 !
Quand aux heures de couvre-feu, elles sont manifestement prises au pif et en vérifiant la direction du vent au doigt mouillé : de 21h à 5h du matin en Côte d’Ivoire. De 20h à 6h du matin au Sénégal. Et peut-être bientôt de 18h à 7h du matin, si tel devait être le bon vouloir du président sénégalais.
Tiens ! Et si nos présidents usaient de leurs pouvoirs désormais exorbitants sur leurs concitoyens, pour organiser des référendums, afin qu’on décide tous ensemble que cette année 2020 prend fin dès demain? Pour espérer enfin passer à autre chose….
Abdulie Njie