[ Tribune ] « L’approche politico-économique du Pr Raoult interpelle » (Par Momar-Sokhna Diop)

Pr Didier Raoult

J’ai suivi l’interview accordé par le professeur Raoult à  BF TV, première chaîne d’information en continu de France, le Jeudi 30 Avril 2020.

     Je rappelle que Didier Raoult est infectiologue directeur de l’Institut Hospitalo-Universitaire (IHU) Méditerranée installé à Marseille en France. Ce professeur soutient le recours à l’hydroxychloroquine, un dérivé d’une molécule utilisée depuis les années 1950 pour soigner notamment le paludisme, afin de guérir les malades atteints du Covid-19.

     Ses positions suscitent, bien évidemment, diverses réactions qui divisent les professionnels de la santé, les politiques et passionnent les médias qui les mettent à la Une de l’actualité.

     Pour ma part, je ne suis ni médecin ni quelqu’un qui opère dans ce corps de métiers. Je me contenterai tout simplement de donner mon impression et point de vue.

     En écoutant le professeur Raoult, j’ai trouvé un homme compétent, serein et très sûr de lui. Heureusement, car ce sont des qualités minimales requises lorsqu’on est médecin scientifique.

     Je suis conscient que la médecine nous impose de faire des études scientifiques avant d’affirmer, si oui ou non, un médicament est efficace  et sans risque, en n’oubliant pas que le risque zéro n’existe pas pour reprendre les propos de Marième Kem’t Diop. Nous saluons également la décision, certes tardive, des États, d’avoir imposé le confinement et le couvre-feu pour casser la chaîne de contamination.

     Il est également utile de rappeler que le professeur Raoult, si j’ai bien compris, dit qu’il utilise l’hydroxychloroquine dans la première phase de l’hospitalisation et non en permanence. Il prétend que ça aide pour la suite. Certain de ses collègues dont Philippe Douste-Blazy, médecin et ancien ministre de la santé, cautionnent.

     En revanche, son approche politico-économique m’interpelle. Il affirme clairement, et je partage son analyse, que c’est dommage que l’économique et le politique guident le monde et aient de plus en plus la mainmise sur la science médicinale, domaine qui jusque-là était assez préservé. Aujourd’hui, comme il l’affirme, la finance internationale et ses lobbies mettent tout en œuvre pour contrôler la santé qui constitue un marché très, très lucratif. Un des secteurs qui rapporte le plus de profits au même titre que le secteur de l’éducation où les politiques publiques permettent de moins en moins d’accompagner les jeunes,, surtout ceux issus des classes défavorisées, vers la réussite. Constat qui donne raison à Pierre  Bourdieu  lorsqu’il alerte sur le fait que l’école continue toujours de creuser les inégalités sociales.

     Finalement, est-ce que ce n’est pas vraiment la liberté de parole et de comportement du Professeur Raoult, attitude qui ne répond pas au standard imposé par « l’intelligentsia médicale » et  par l’ordre établi, qui dérange plutôt que ses qualités de médecin ? Pour reprendre les interrogations de mon ami Abdou Thiam.

     En tous les cas, des pays comme le Sénégal, des villes comme Marseille, semblent adhérer à ses recommandations qui pour l’instant donnent apparemment des résultats, je dirai avec beaucoup de prudence, assez satisfaisants.

Momar-Sokhna DIOP

Professeur /Écrivain