3ème mandat : Comment Alassane Ouattara avance à pas feutrés pour rendre « évidente et naturelle » sa candidature auprès de l’opinion publique ivoirienne

Un seul être vous manque (feu le dauphin présidentiel Amadou Gon Coulibaly) et tout doit être repeuplé ! S’il n’a pas encore annoncé officiellement son intention, Alassane Ouattara est désormais totalement parti pour être candidat à sa propre succession, pour un troisième mandat, exercice périlleux devenu un totem honni dans les 15 pays de la CEDEAO, que la société civile dénonce dès qu’elle survient. Aussi, Ouattara avance à pas feutrés vers cette candidature, dont il laisse l’idée prendre dans l’opinion ivoirienne avant toute déclaration, afin de rendre celle-ci naturelle et évidente. Évidente car il aura tout fait pour ne pas essayer de rempiler une fois de trop à la tête de la Cote d’Ivoire, mais si l’alignement fâcheux des astres a contrarié sa volonté de transmettre le flambeau, qu’y peut-il sinon faire à nouveau « don de sa personne à la Côte d’Ivoire », pour reprendre l’expression pompeuse de Bédié, l’autre candidat préhistorique, à son propre sujet ? Il y a quelques mois, le président ivoirien jurait de vouloir laisser les clefs de l’exécutif à la jeune génération, mais la disparition de son dauphin désigné, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly a rebattu toutes les cartes. Et il n’est pas sûr que si on sort le joker Ouattara de la main du RHDP, le parti présidentiel puisse disposer d’une autre carte gagnante.
Plusieurd barons du parti au pouvoir font déjà passer le message que la candidature du président ivoirien pour un troisième mandat ne fait guère de doute. Le directeur exécutif du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), Adama Bictogo, affirme sans ambages qu’Alassane Ouattara « est le mieux placé pour battre le candidat [Henri Konan] Bédié au premier tour », qu’il reste « le ciment de l’unité du RHDP », et que sa candidature « éviterait une guerre des dauphins ». Une pétition recherchant 700 000 signatures a été lancée pour appeler a la « recandidature » de Ouattara à « redoubler ».
Promesse non-tenue et procès en légitimité
À l’instar de ce que l’on a observé pendant l’année préélectorale, un jeu de poker menteur et une période de doutes et de tractations entoure la nomination du candidat RHDP. Si les cadres du parti présidentiel poussent pour un troisième mandat, cette option ne serait pas sans poser un possible risque de troubles civils pour la Cote d’Ivoire. Il va donc falloir faire passer la pilule amère en douceur. La légalité même de la candidature de Ouattara sera remise en cause, en raison de la nouvelle loi constitutionnelle qui limite à deux mandats l’exercice du pouvoir, même si Ouattara avait déjà déclaré que cette limitation ne s’applique pas à lui. « Jusqu’au jour du vote, nous lui rappellerons qu’il n’a pas de parole, et qu’il renie sa propre Constitution », indique le Front populaire ivoirien (FPI), le parti de Laurent Gbagbo, troisième parti du pays et possible faiseur de roi.
En tous les cas, Ouattara ne se déclarera qu’au dernier moment , comme contraint et forcé : « Ils vont jouer la montre», pronostique un observateur, qui ne s’attend pas une annonce officielle avant la fin du mois de juillet.
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