L’opposition ivoirienne a une nouvelle fois laissé planer le doute sur sa participation à la présidentielle du 31 octobre en ne retirant pas auprès de la Commission électorale indépendante (CEI) ses « spécimens d’affiches et de bulletins de vote » alors que la campagne électorale s’ouvre jeudi.
Une aile du Front populaire ivoirien (FPI), dirigée par l’ancien Premier ministre et candidat d’opposition Pascal Affi N’Guessan, a parallèlement appelé mercredi ses militants à ne pas retirer les cartes d’électeurs.
« Pour nous, la CEI n’existe plus en tant qu’organe compétent chargé de l’organisation de la présidentielle », a expliqué Maurice Kakou Guikahué, numéro deux du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, principal parti d’opposition), dont le candidat est l’ancien président Henri Konan Bédié.
« Les représentants » de MM. Bédié et Affi N’Guessan « ne se sont toujours pas présentés » pour retirer les « spécimens », a déclaré le responsable de la communication de la CEI, Inza Kigbafori, mais « ils peuvent toujours venir les chercher ».
« La loi fait obligation à la CEI de délivrer dix milles spécimens de bulletins de vote et 100.000 affiches aux quatre candidats en lice pour la présidentielle » a-t-il expliqué, mais le retrait des « spécimens » n’est pas indispensable pour participer à l’élection.
La Côte d’Ivoire utilise des « bulletins uniques »: le nom et la photo de tous les candidats figurent sur le même bulletin et l’électeur coche son choix – contrairement à d’autres pays où chaque candidat a un bulletin différent. Les spécimens servent généralement aux candidats pour montrer à leurs militants comment on vote, et les affiches sont posées à l’entrée des bureaux.
Dans un communiqué, le FPI d’Affi N’Guessan a rappelé à ses militants et sympathisants qu’en application du mot d’ordre de « désobéissance civile » lancé par l’opposition, « ils sont invités à ne pas prendre part à l’opération de distribution et de retrait des cartes d’électeurs », qui débute ce mercredi et dure jusqu’au 20 octobre.
– CEI déséquilibrée –
« Il est important que les autorités comprennent la nécessité de s’asseoir autour d’une table pour discuter. Nous avons encore quelques jours avant le 31 octobre pour échanger », a expliqué à le secrétaire général du FPI Issiaka Sangaré.
L’opposition, qui conteste l’impartialité de la CEI et du Conseil constitutionnel, laisse planer le doute depuis quelques semaines sur un boycott du scrutin.
Le Conseil constitutionnel a rejeté le 14 septembre la candidature de l’ex-chef rebelle et ancien Premier ministre Guillaume Soro, de l’ancien président Laurent Gbagbo et de 38 autres candidats mais a validé celle du président Alassane Ouattara à un troisième mandat controversé, ainsi que celles de MM. Bédié, Affi N’Guessan, et du dissident PDCI Kouadio Konan Bertin.
L’opposition a suspendu sa participation à la CEI.
« Aujourd’hui, il n’y a pas de représentants des partis de l’opposition. La loi créant la CEI exige une représentation équitable entre l’opposition et la majorité, ce qui n’est pas le cas », a souligné M. Guikahué.
La crainte de violences meurtrières est forte dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, dix ans après la crise post-électorale née de la présidentielle de 2010 qui avait fait 3.000 morts.
Une quinzaine de personnes sont mortes en août dans des violences survenues dans le sillage de l’annonce de la candidature du président Ouattara à un troisième mandat et des échauffourées ont eu lieu dans plusieurs localités après l’annonce du Conseil constitutionnel de la liste des candidats retenus pour le scrutin.
Elu en 2010, réélu en 2015, M. Ouattara, 78 ans, avait annoncé en mars qu’il renonçait à briguer un troisième mandat, avant de changer d’avis en août, après le décès de son dauphin désigné, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly.
La loi ivoirienne prévoit un maximum de deux mandats mais le Conseil constitutionnel a estimé qu’avec la nouvelle Constitution de 2016, le compteur des mandats de M. Ouattara a été remis à zéro, ce que conteste farouchement l’opposition.
Tract, avec agence