Faut-il sauver le soldat Macky ?
Au regard du nombre de morts, de blessés et de la très forte prolifération des violences politiques, nous ne devons plus nous poser la question à savoir s’il faut sauver le soldat Macky ou non. Il s’agit de sauver le Sénégal et de tout mettre en œuvre pour atteindre cet objectif. Quant à Macky Sall, il faut que ceux qui en ont la possibilité l’aident à sortir des pièges du pouvoir. C’est une urgente nécessité si nous voulons aider le Sénégal, pays en très grand danger.
Toutes les volontés, qu’elles soient religieuses, associatives, citoyennes, de la diaspora ou de la communauté internationale, sont bienvenues. La responsabilité est collective.
Analysons un peu la situation.
Si nous considérons l’offre politique comme un produit, nous pouvons clairement constater que celle de Benno Bokk Yakar et de Macky Sall est définitivement entrée dans sa phase de déclin. La fleur de l’alternance de 2012 s’est fanée.
Elle a connu de fortes périodes de lancement et de croissance. En revanche l’offre de Benno Bokk Yakar s’est rapidement installée dans une courte phase de maturité qui l’a brutalement basculée dans un déclin qui semble s’accélérer. Faisons très attention. La chute pourra être fatale, très fatale.
En effet, la grogne sociale s’est établie au Sénégal. Elle semble atteindre le même niveau que celles qui avaient entrainé la chute d’Abdou en 2000 et d’Abdoulaye Wade en 2012. La montée de la colère sociale semble irréversible.
Les résultats des élections locales constituent un indicateur de la fin du régime de Macky Sall.
Il ne s’agit pas de nous contenter à constater les faits ou à critiquer pour critiquer. Notre devoir de citoyen plus ou moins averti et engagé nous oblige à tout mettre en œuvre pour aider Macky Sall à revenir à la raison. Il s’agit de l’aider à lever, sans attendre, le doute d’une potentielle candidature pour un 3ème mandant à la présence de la République. Il faut l’aider à se donner le courage de s’adresser ouvertement et publiquement aux Sénégalais en leur affirmant qu’il ne sera pas candidat en 2024. Une telle déclaration, par exemple télévisée, apaiserait les tensions.
Il s’agit également de mettre de côté toute combine ou manœuvre politique qui pourrait écarter, injustement, tel ou tel candidat. Il faudra l’amener, rapidement, par des actes, à garantir des élections transparentes. Si ces deux recommandations se mettent en place, le Sénégal retrouvera, tout de suite, la paix nécessaire car sans la paix aucune alternative n’est possible.
Par ailleurs nous invitons l’opposition et tous nos concitoyens à organiser l’exercice du pouvoir très différent de sa conquête.
Les Sénégalais en ont assez de subir, toujours, les mêmes pratiques qui ne respectent jamais leurs principales doléances. Afin d’éviter de retomber sur ces mêmes pièges, les potentiels candidats doivent travailler à construire un projet de société endogène qui instaurera la culture du travail et non celle de la prédation, du clientélisme et des arrangements pour reprendre les exacts propos d’Axelle Kabou. Le Sénégal possède encore des chances de sortir des difficultés auxquelles l’installe l’élite politique souvent irresponsable. Les assises nationales constituent, toujours, une ressource sur laquelle le pays pourra s’inspirer pour la refonte de la République.
Le Sénégal dispose de compétentes ressources humaines prêtes à servir le pays. Il s’agit également d’un pays qui regorge de ressources naturelles et minières de qualité et en quantités très importantes. Il s’agit de les remobiliser pour créer de la richesse, des emplois notamment pour les jeunes et de la fiscalité nécessaire pour développer l’éducation, la santé et la solidarité. Ce sont des recommandations que nous avons formulées dans notre dernier ouvrage intitulé « Sénégal, diagnostic d’un pays candidat à l’émergence ». En résumé voici notre modeste contribution à l’heure où notre cher pays traverse de violentes zones de turbulence.
Momar-Sokhna DIOP
Professeur d’économie-gestion et écrivain autour de plusieurs ouvrages dont « Sénégal, diagnostic d’un pays candidat à l’émergence », Editions l’Harmattan, 2019.