Tract – Sur un autre aspect du dossier Sweet beauty et de la confrontation récente qui s’en est suivie entre Ousmane Sonko et Adji Sarr, un autre étudiant a été interpellé sur la question.
Dans cet entretien, Magueye Seck, étudiant en master 2 en Droit Privé, nous fait une lecture purement juridique du dossier Sweet Beauty ainsi que sur la confrontation.
« Rappelons tout d’abord qu’on est dans un cadre purement pénal même si l’on constate qu’il y a une forte dose de politisation de cette affaire pendante depuis bientôt 2 ans. Cette confrontation est une suite tout à fait logique compte tenu des règles de droit pénal et de procédure pénale. En fait comme on le sait pertinemment, toute infraction commise qu’elle soit volontaire ou involontaire nécessite une procédure afin de venir à bout de l’idéal du droit judiciaire qui est la justice. Du moment où que tous les éléments qui bien des cas pourraient empêcher l’enclenchement de la procédure sont mis à l’écart tel le cas ci-présent avec à l’époque M. SONKO qui était député à l’assemblée nationale sénégalaise et ce statut avait comme corollaire l’immunité parlementaire pouvant lui servir de bouclier contre toute procédure contre lui », a d’abord souligné Magueye Seck.
Avant de poursuivre :
« Toutefois, cette immunité levée la procédure est engagée entrainant l’intervention du Procureur de la République qui est par essence maitre des poursuites qui confère l’enquête à la police judiciaire et rien empêche au parquet en cas de besoin de solliciter le juge d’instruction pour l’ouverture d’une information judiciaire. Sollicitation tout à fait obligatoire en matière criminelle conformément aux dispositions de l’article 70 du Code de Procédure Pénal qui prévoit « l’instruction préparatoire est obligatoire en matière de crime sauf dispositions spéciales » et l’infraction en question qui est le viol qui a été criminalisé compte tenu de la loi 2020-05 du 10 Janvier 2020 » nous a-t-il renseigné.
Ainsi, tentant de faire la distinction entre l’aspect politique et juridique sur cette affaire, M. Seck poursuit :
« Nous avons constaté qu’au cours de cette audition dans le fond entre les deux protagonistes communément appelée confrontation des informations sortaient progressivement édifiant le public sur ce qui était débattu dans le bureau du doyen des juges. Actes qui violent ainsi les règles régissant l’instruction qui par essence est secrète. Néanmoins ceci peut paraitre compréhensible du moment que l’une des parties est très influente dans la politique, ce qui aura des répercussions comme à l’accoutumé par rapports à des affaires impliquant des politiques »a-t-il souligné.
Toujours sur la même question, le futur Me en Droit renchérit :
« Concernant l’aspect politique ou juridique de ce dossier il serait assez complexe de pouvoir faire la dichotomie. Le premier élément de cette complexité relève du fait que la partie accusée est dans le monde politique et demeure la figure emblématique de l’actuelle opposition. Ce qui fera l’essor de plusieurs discours allant dans le sens d’une politisation de ce dossier. Maintenant, cette distinction entre l’aspect politique et juridique de cette affaire se fait à un double niveau, d’une part la politisation partielle qui nous constatons était inévitable et d’autre part la juridicité qui est tout à fait normale car toute activité présumée répréhensible est encadrée juridiquement ».
Continuant son raisonnement, il martèle:
« En effet depuis les premières informations concernant ce dossier sont sortie, une bonne partie de l’opinion nationale s’est inscrite dans la logique qu’il existe une once de politisation au regard d’un précédent judiciaire dans la sphère politique avec les cas K.WADE et K.SALL qui comme nous l’avions constaté étaient de potentiels candidats et membres des forces de l’opposition à l’époque (2013/2017). En plus de ces éléments susmentionnés les premières informations contenues dans les procès-verbaux de première audition diligentée par la Section de Recherches montraient l’implication même par raccourci de personnalités hautement placées soit du gouvernement ou de certaines institutions. Ce qui en partie corrobore l’hypothèse de la thèse du complot initiée par l’accusé et d’autres acteurs. Nous pouvons rajouter le fait également que des membres de la majorité qui le plus souvent dans leur intervention se sont inclinés pour prendre la défense de la plaignante même si d’emblée ils prétendaient ne pas avoir de lien ni direct ni indirect avec le dossier ».
« D’autre part l’aspect juridique évoqué tantôt est incontournable comme rappelé prématurément toute infraction commise nécessite l’intervention de l’autorité juridictionnelle. Nous constatons que la procédure au début était biaisée du fait qu’après plainte de Mme SARR il y a convocation de M.SONKO sans pour autant procéder à la levée de son immunité parlementaire comme la loi l’exige même s’il y a des limites à cette règle ( en cas de flagrant délit). Néanmoins la procédure a suivi son cours logique jusqu’à l’état actuel des choses même si en revanche il y a eu pas mal d’anomalies ».
Pour nous expliquer les issus juridiques possibles dans cette affaire, M. Magueye Seck défend :
« Au égard aux différentes auditions effectuées par le juge instructeur nous pouvons dire qu’il y a deux issues possibles dans ce dossier et ceci relève du pouvoir du juge qui peut délivrer des ordonnances. Ainsi il peut soit délivrer une ordonnance de non-lieu ou une ordonnance de renvoi. Mais également recourir au mécanisme de la détention provisoire au besoin le temps d’approfondir son inquisition. En effet concernant, la première alternative qui est l’ordonnance de lieu est délivrée suivant des conditions substantielles. Ainsi si le juge d’instruction au cours de ces auditions diverses compte tenu des réponses et des éléments de preuve mis à disposition constate après examen minutieux qu’il n’y a pas possibilité de renvoyer l’affaire vers une juridiction de jugement peut délivrer une ordonnance de non-lieu disculpant ainsi l’accusé conformément à l’article 171 du Code de Procédure Pénale », a-t-il dit dans un premier temps.
Dans un second temps, notre interlocuteur note :
« D’autre part, il est possible aussi pour le juge de délivrer une ordonnance de renvoi. Cette alternative postule l’idée selon laquelle après les diverses auditions et que le juge constate qu’il y a des éléments assez flous ; il renvoie le dossier vers la juridiction répressive (article172 du Code de Procédure Pénale) qui a compétence et plénitude à condamner ou relaxer. Il est également plausible pour le juge de mettre en détention provisoire l’inculpé à l’aune de l’article 127 du présent Code ».
Concluant ses analyses, le spécialisé en droit privé confie :
« Dans cet aspect d’une condamnation ou non je trouve qu’il y aura toujours des conséquences juridiques que du côté de l’opposition que de celui du pouvoir, des conséquences qui pourront être précédées par une once de politisation. En effet vu qu’on est à la phase d’instruction, la condamnation serait prématurée var relevant de la juridiction de jugement. Issu qui peut être inéluctable dans bien des cas en cas de renvoi. Supposons qu’on aille jusqu’au jugement et que M.SONKO soit condamné, la première conséquence serait sa perte d’éligibilité probable et de ses droits civiques risquant ainsi d’affaiblir l’opposition qui depuis quelques temps est dans une dynamique assez prometteuse au regard des dernières échéances électorales. Alternativement, en cas de non condamnation, vu que l’inculpé a tout le soutenu la thèse du complot, pourrait introduire des demandes reconventionnelles qui sont assez usitées en matière procédurale prétendant ainsi la traduction en justice de tous ce qui pourraient être mêlées dans cette affaire. Chose qui aura plus de conséquences politiques que juridiques car réduirait la crédibilité du régime en place et renforcerait la marche de l’opposition. Et personnellement cette solution servirait de relais jurisprudentiel à tout autre régime ou entité d’éviter de procéder ainsi dans la sphère politique », a-t-il conclut.
Hadj Ludovic