Tract – Le deuxième roman d’Ousseynou Nar Gueye est paru ce mercredi 20 décembre 2023 et est désormais en librairie au Sénégal. Ce second roman a pour co-éditeurs Les Éditions Presqu’île Lettrée (Sénégal) et Youscribe (France). « Immeuble Nal, Douala » est le fruit de la plume qui narre le périple d’un jeune garçon, lequel nous fait entrevoir une fresque de l’Afrique des années 70 – 80, et également toute la musicalité de cette époque faite d’humour et d’humeur parfois gracieuses, quelques fois hilarantes, rarement crasses et occasionnellement fauves…
Cet enfant – Fara est son nom – a ici décidé de narrer, que dis-je, a eu une envie impérieuse et précieuse de parler. Il n’a pas voulu seul dans son coin-souvenir, avec ses pensées, ses allégories fourmillantes de vies et de vivres, depuis l’école Saint Jean)-Bosco – avec ses maîtres tous « aussi fieffés chicotteurs abonnés à la bastonnade, surtout au fameux supplice du « tendre par quatre » – en passant par les Cours Sainte-Marie de Hann où le pater venait les chercher, lui et sa fratrie, dans sa Renault 12 pour rentrer à Pikine Icotaf .
Il veut partager, mais généreusement, souvent sans prendre de gants ou encore refusant d’enfiler des chaussettes, et faire resurgir le royaume qui a construit son enfance – fait d’êtres qu’il a aimés et d’autres qu’il ne (re)verra jamais avec un rictus de requiem – où celle qu’on appelle affectueusement la Mamma tient le rôle de reine qui régit les affaires de la résidence, le pater, lui, tenant les rênes de l’envergure-chef de famille africaine élargie à tous les parents venus d’ici et d’ailleurs.
Et… d’ailleurs, entre les notes captivantes de kora ou de khalam que diffusait splendidement Radio Sénégal en ondes courtes, et les aubades d’André Marie Tala du Kamerun, la vitalité du récit a fait ressurgir, par endroit, le longiligne homme d’Etat Abdou Diouf, successeur du président Léopold Sédar Senghor qui nomma le père du narrateur Consul honoraire à Douala, chez le président Ahidjo qui, après services rendus à la nation et ou plutôt après sa retraite (pour cause de maladie ?), a élu domicile et «dernière demeure» au pays de la Teranga.
De ce pays que le pater a quitté – « perché sur des sacs de charbons », comme aime à chahuter la grand-mère maternelle -, mais en bon et éternel mouride pour le Kamerun, au point de donner le nom de sa bijouterie « Khadimou Rassoul » (surnom donné au vénéré Cheikh Ahmadou Bamba), la culture et les bonnes senteurs du thiouraye s’entêtent pour flatter, dans la complicité, l’humus verdoyant et vif du pays hôte.
Et dans la chaleur de cet immeuble Nal où toute la famille se retrouve dans un appartement, l’enfant-narrateur – lecteur-né qui adore dévorer les livres jusqu’aux romans qui sont au programme des classes de ses sœurs aînées – a tenté d’ériger son empire pour forger son emprise sur la vie, dans un déluge de chroniques fait de mots et maux, après s’être régalé, quelque soir, de «‘soya’, la viande grillée au feu de bois sur des fûts ouverts aux deux extrémités ».
Cet ouvrage est surtout une véritable immersion dans le royaume d’enfance de trois bonnes années durant lesquelles, Fara, ce jeune garçon à l’intelligence précoce, s’est aménagé une galerie de souvenirs vécus et/ou reconstitués dans une atmosphère familiale, entre le Sénégal et le Kamerun (plus particulièrement à Douala), avec ses frères Bada et Allou, ses sœurs Xuradia, Sagar et Soukeyna.
Il apprend à vivre dans un monde, en perpétuel mobilité, sans perdre les pédales. Même si, après que le pater s’imposa polygame en prenant une seconde épouse, Thioumbé, son nom, – presque de l’âge de son aînée – et qu’ensuite il se vit « expulser » de cette ‘monarchie infantile’ pour se retrouver – la Mamma, lui et le autres – encore au Sénégal, Fara a toujours gardé vivant la nostalgie et la magie du bon vieux temps. Qui font le don et formulent la pointure de ce roman aux allures autobiographiques.
« Immeuble Nal, Douala » fera l’objet d’une séance de présentation où l’auteur sera interviewé par la Docteure ès lettres Véronique Petetin, session suivie d’une séance de dédicace avec vente d’exemplaires du roman, le vendredi 29 décembre 2023 à Dakar, dans un restaurant de la place.
Par Cheikh Tidiane Coly
Directeur de Publication du site d’info « Tract » et du tabloïd pdf « Tract Hebdo »