Tract – Le bilan de la filature des licences de pêche au Sénégal est préoccupant, avec les nombreux rapports de la Cour des comptes – et, j’en passe. Il met au grand jour des scandales ahurissants, des pratiques douteuses plongées dans les eaux bourbeuses au large de nos côtes. Des milliards de nos pauvres francs CFA sont dans les nasses de quelques conspirateurs qui commettent la pire de crise alimentaire.
Ces incidents, au-delà de nous faire perdre une bonne partie de nos flux financiers, ont des conséquences désastreuses sur la communauté de pêcheurs et le collectif des consommateurs, menaçant la sécurité économique et alimentaire du pays. Là, en parlant de bouffe, je veux juste me souvenir du succulent ‘yabooy’ déversé à gogo sur la plage de Thiaroye et qu’on faisait braiser à défaut de le frire pour ensuite s’en régaler après assaisonnement au citron et quelques pincées de piment…
Je revois encore ce poisson être dégusté gratis le long de la côte sénégalaise… Maintenant, le ‘yabooy’ est licencié de nos eaux pour le faire migrer vers d’autres berges. Je ne parle même pas du capitaine, du sompaat… C’est trop révoltant de ne plus sentir ces poissons se rétablir avec nos papilles gustatives.
Le ‘céebu jënn’, notre plat national, est déprécié et n’est plus signé ‘Penda Mbaye’; le‘firiir’ n’a plus une grande place dans nos menus quotidiens, la sapidité du ‘kaldou’ s’est amoindrie depuis la Casamance… Que nous reste-t-il ? Plonger dans les eaux, à la recherche du poisson en haute mer ? S’agglutiner, comme sardines dans nos embarcations ne servant plus à pêcher le poisson, pour échouer dans le ‘poison’ de l’immigration clandestine ?
Non ! Il est impératif de prendre des mesures sérieuses pour remédier à cette situation et assurer une gestion transparente et durable de nos ressources marines. Certainement, le désarroi des jeunes face à la situation des licences de pêche est une des raisons qui les poussent à risquer leur vie en prenant les pirogues pour émigrer en Europe. Cela souligne l’urgence de reprendre en main et ‘au filet’ ces problèmes de manière effective pour offrir des opportunités économiques viables et dissuader l’émigration clandestine.
Mais d’abord, dire la vérité, avec fermeté – et compassion ?-, est déterminant, en invitant et en incitant tout le monde à la responsabilité pour un changement positif. Les autorités doivent prendre la décision de puiser dans la force de nos convictions et l’énergie de nos cultes et notre culture valorisant l’honnêteté et la franchise. Elles se doivent de parler avec clarté et objectivité, en utilisant des preuves solides et en soulignant l’impact des scandales sur la vie des gens.
Il est temps d’encourager également l’engagement citoyen et la responsabilité collective pour remédier à ces situations qui, sans cesse, nous emportent dans les flots de sanglots et des récriminations.
Alors, à tous ceux qui ont commis des fautes avec ces licences de pêches, aucun rêve ne leur est permis. Point de trêve, il faut les poursuivre, ‘night and day’. Il faut leur emballer leurs crimes dans une étoffe de cauchemar en plein sommeil de midi. Le temps de leur notifier leur voracité comateuse, leur narrer leur perfidie écumeuse. Et les condamner en pleine eau, dans la tourmente de l’Atlantique! Après, viendront le ‘masla’ et – pourquoi pas ? – le pardon.
Par Cheikh Tidiane COLY – Al Makhtoum