(1ère parution dans ‘’Tract Hebdo’’ du vendredii 25 juillet 2025) –
Le titre de cette tribune est inspiré de l’adage qui dit : ‘‘Rira bien qui rira le dernier’’. Dans un Sahelistan dans lequel les États de l’AES ont fini d’expulser toute présence militaire ou diplomatique française (au Burkina, au Mali et au Niger), les autres États de cette UEMOA qui se survit à elle–même ne pouvaient être en reste : il fallait que les quelques rares et parcellaires dernières bases militaires françaises décampent, devant surtout le dégagisme des opinons publiques nationales, de ce côté-ci du Sahara.
Sur décision de Dakar, d’Abidjan ou de Paris ? Le président Macron, jamais en reste de fortes phrases disruptives, a dit devant les ambassadeurs de France réunis en conférence annuelle à Paris, que la décision avait été prise ‘d’un commun accord’ : mais, a ajouté le mari de Brigitte Trogneux : ‘Comme nous sommes polis, nous les avons laissé l’annoncer eux-même d’abord’. Arrgh. Pour la politesse, on repassera, hein… ‘‘Je suis poli ’’ : il suffit de le dire pour cesser de l’être. Et passer plutôt pour vaniteux et prétentieux ; épithètes que la presse française et l’opinion hexagonale ne se privent pas de décerner régulièrement à leur chef de l’État, alias Jupiter, le président au gouvernement Bayrou qui ne tient que d’un fil, corde raide qui s’effiloche motion de censure après motion de censure, toujours plus près de réussir.
Bon, trêve de franchouillardises. A Dakar, la dernière base militaire française a vidé les lieux en cette fin juillet 2025. Laissant quand même 160 travailleurs sénégalais, employés dans des conditions décentes, sur le carreau du chômage de masse, qui est la chose la plus démocratiquement partagée au pays de Goorgoorlous de feu l’écrivain-vétérinaire Birago Diop – ce qui au passage ne nous empêche pas d’avoir aussi plus de milliardaires que de légal dans ce pays nôtre, les voies de Dieu y étant impénétrables.
Or donc, comment se fait-ce qu’Abidjan se soit débarrassée de sa dernière base française de Port-Bouët avant Dakar ? Mystère et boule de gomme, sur ce timing étonnant. En tout cas, en les faisant partir en fin janvier 2025, le président éternel, ADO, alias le Mossi, a réussi d’une pierre plusieurs coups :
-Réduire la portée du discours de ceux qui le traitent de valet de la France et de dernier Préfet de la Françafrique dans l’UEMOA.
-Se poser en panafricaniste sérieux et serein auprès de la jeunesse ivoirienne desquels il s’apprête à solliciter un ….quatrième bail présidentiel de 5 ans, en octobre prochain.
-Passer pour le patron de la région Ouestaf, seul à même de discuter de choses sérieuses d’égal a égal avec la France de Macron : d’abord sur l’ex-future Éco, la prochaine (quand ?) monnaie de la CEDEAO ; puis sur la présence militaire française devenue plus qu’encombrante symboliquement.
-Se donner un répit dans les piques incessantes des Abeilles Panafriponnes genre Nathalie Yamb, Kemi Seba et Franklin Nyamsi, qui ont moins de grain à moudre et de sucre à casser sur le dos de l’Excellence Alassane Dramane
-Se laver du péché originel d’être l’époux d’une Française ? Restons sérieux.
Donc, trêve de bon points décernés pour cette décision éburnéenne pionnière de Ouattara, qui éborgne un peu les Gorguis sénégalais, devant lesquels il gagne aux points sur le front disputé de la bataille du titre de plus grand leader souverainiste panafricain dans le Sahel et dépendances.
C’est fait aussi. Dakar n’a plus son camp Geille, dernier vestige de présence militaire française, avec juste une poignée de soldats encore ici ces dernières années, les EFS (Éléments Français au Sénégal) comme on les appelait désormais ; une centaine de piou-pious et leurs chefs.
Mais, à quoi bon pouvaient encore servir ces résidus-croupions de bases françaises ? Recueillir du renseignement militaire, espionner avec des incursions de drones et des satellites, faire dans l’intelligence économique en direction de leurs tentatives supposées ou avérées pour maintenir le leadership commercial des multinationales à capitaux français ou envers des pays de l‘AES pour les déstabiliser, comme les en accuse le président burkinabè IB qui n’a pas manqué d’indexer Ouattara comme homme-lige des Français, pour plusieurs tentatives avortées (réelles ou pas ?) de putschs et de contre-putschs à Ouagadougou, pays où le pouvoir Ouagabonde souvent ? Ou encore protéger le palais présidentiel sénégalais en cas de tentative de putsch totalement improbable par les si républicains soldats sénégalais ? Nenni. Regrouper les résidents français au Sénégal en ilots sécurisés en cas d’émeutes (astafourllah !) ou de guerre civile généralisée (re-astaghfiroullah !) pour les évacuer du pays ? Well, on ne sait jamais hein, mais il ne faudra pas oublier d’évacuer les binationaux français du fin fond du Fouta aussi et pas que les Français de Dakar et de Saly Portudal. Former l’élite des armées africaines ? On n’est pas obligé d’être stationnés à demeure dans un pays pour y faire de la formation d’homologues militaires.
En tous les cas, dans le sillage de la 80ème commémoration si solennelle en décembre 2024 du massacre des Tirailleurs Sénégalais au camp de Thiaroye (en 1944, pour un bilan humain de victimes encore inconnu), la présence d’une base, même miniature, française, si obsolète et tout autant provocatrice, n’était plus possible au Sénégal. On a acté l’évidence et ils sont partis.
Pourtant et pour autant, dans le génie civil, les EFS aidaient beaucoup notre armée nationale et nos pompiers sénégalais ; et ce sont eux qui ont dégagé vers le trottoir la passerelle à piétons, tombée il y a quelques mois au niveau de la double voie routière à hauteur de Yoff Tonghor.
Mais bon, quand la table est desservie : il faut se lever et partir. Basta. Full stop.
C’est la deuxième et dernière mort de l’emprise militaire française au Sénégal. La première mort a été symbolique, lorsque en 2002, le dernier survivant des Tirailleur sénégalais de 14-18 dans notre pays est passé de vie a trépas, la ….veille du jour durant lequel la France officielle devait lui apposer sur la poitrine, dans son lit de grabataire au fond de son village, une médaille pour services rendus à la France. La seule chose que le vieil Abdoulaye Ndiaye (c’est son nom) a demandé avant de mourir était le bitumage de la route entre son village et la route nationale asphaltée. Ce qui fut fait, notamment grâce a la fondation Sococim, plus ancien cimentier du Sénégal.
Verdict : Ouattara et Diomaye peuvent se payer le luxe d’être des p’tits railleurs vis-à-vis de Macron.
Au Gabon de CBON (Clotaire Brice Oligui Nguema), c’est plus compliqué , comme on dit dans les pages Facebook à la section informations personnelles amoureuses. Même si le président Bongo a été chassé, sa famille pourchassée, cadenassée en geôle, puis tous expulsés du Gabon, ils sont aussi des citoyens français, cette ex-famille présidentielle gabonaise (ils attaquent d’ailleurs l’État gabonais en justice devant les juridictions françaises pour sévices et mauvais traitement en cette qualité de citoyens de Marianne).
Oligui, qui a vu son putsch adoubé par Macron ; comme celui-ci l’a fait avec MIDI (Mahamat Idy Deby Itno) veut et va continuer de s’accommoder de la présence militaire au Gabon.
On peut donc lui décerner jusqu’a nouvel ordre, une belle médaille en chocolat (excellent dessert, s’il en est !) de Tirailleur Bon Banania dont le sourire éternel de grand danseur pendant sa campagne électorale présidentielle victorieuse n’est pas sans rappeler la banane de dents blanches éclatantes du zouave à chechia rouge, pantalon bouffant et bottes noires, sur les publicités de la coloniale poudre à petit déjeuner Banania, dont Léopold Senghor, dans un poème post captivité allemande, se promettait de tous les arracher -ces sourires – des murs de France.
Mais bon, le même Senghor implorait aussi Dieu d’épargner et de protéger du joug nazi la France, fille aînée de l’Église, dans un poème aux accents ardents.
Et donc ? On n’est pas sûr d’en avoir fini avec les rapports schizophréniques entre populations francophones subsahariennes d’un côté et Français de l’autre, notamment au niveau des leaders politiques des deux bords. Cela reste toujours du : ‘‘Je t’aime, moi non plus. Et réciproquement’’.
Sinon ? A quand le wolof officiellement décrété comme deuxième langue officielle du Sénégal aux cotés du Français ? Cela me semble la prochaine étape la plus urgente à réaliser, après avoir repris la dernière emprise militaire française au Sénégal. ‘‘Naar bu soonné, wakhi wolof’’ !
Et pendant ce temps : personne ne moufte sur les bases militaires américaines en Afrique, dont personne ne connait même les localisations exactes, gardées secrète. Pour vivre heureux, vivons cachés ? Je ne savais point que cela faisait partie du American Way of Life et de leur American Dream si ardemment poursuivi depuis trois siècles, par les habitants, autochtones ex-cowboys colons ou par les Ricains d’importation récente.
Conclusion de tout cela ? Remettons-nous en à Dieu aussi pour ce qui est du salut de nos pays subsahariens francophones. Comme dit le Dieu-Dollar : ‘‘In God, we trust’’. Que tout le monde s’assoie, et que Dieu nous pousse.
Ousseynou Nar Gueye
▪︎ Directeur Général de Tract Hebdo et de Tract.sn
▪︎ Directeur Général d’Axes et Cibles Com (www.axes-cibles-sn.com)