Tract – Lamine Diack, ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) était un homme pluri-casquettes. Il était le sportif, le politique, le social, l’humanitaire. Il était… La symphonie ‘Lamine Diack’ belle au départ, et on s’attendait à fêter avec lui et en beauté la fin du festival de ses années de gloire à l’international. A l’arrivée, il était… A la fin de sa vie, un homme que le succès a rattrapé et écorché malencontreusement pour le mettre au banc des accusés. Condamné avec une dose de dopage ‘anti-glorifique’, Lamine reviendra au Sénégal ce pays qui l’a vu naitre, à Dakar cette terre qui l’a vu mourir auprès des siens.
Peut-être avait-il trop brillé au soleil de la gloire pour que le destin l’y oublie jusqu’à le faire brûler ? Était-il trop ébloui par la quiétude offerte – comme un chez-soi tranquille – à cette station de la célébrité qu’il n’aurait pu percevoir ce qui se tramât, avec ou sans son consentement – pour entacher la blancheur de ses années d’allégresse ?
Lamine Diack a quitté ce bas-monde, en décembre 2021, sur une note dissonante, une composition embrouillée vers la fin de sa carrière à la grande instance de l’Athlétisme mondial. Le natif de Dakar en 1933 était au sommet de la gloire quand, en novembre 2015, on le fait descendre de son piédestal avec le jeu de la boulette, pardon, la roulette russe. Lamine Diack est mis en examen pour ‘corruption passive et blanchiment aggravé’ dans le cadre d’un scandale de dopage russe. Lui qui était en bisbille avec le président Abdoulaye Wade, est éraflé encore par la justice française pour avoir ‘fait financer en partie’ la campagne de Macky Sall par la Russie. Le jeu en valait-il la chandelle ?

Toujours est-il, suspendu provisoirement du Comité internationale olympique – CIO (il démissionnera), Lamine Diack voit encore s’ajouter à son panier d’accusations des rétributions de 3,5 millions de dollars versés en octobre-novembre 2011 selon le fisc américain, à son fils Massata Diack. Là, il est question de famille. Toujours la famille, qui vous embarque dans une question de sang, de spontanéité et de la forte promesse de voir, de montrer, de démontrer et dire que son fils ‘a bien travaillé’. Pourtant le Parquet national financier demande le procès au nom du père et du fils. Les liens de sang vont jusque-là. Non. Lors de son procès ouvert le 8 juin, l’ancien président de l’IAAF ne s’est pas retenu. Il a clashé son fils – Pape Massata Diack poursuivi, est allé se terrer à Dakar loin de son père – le qualifiant, selon la presse, de s’être comporté en ‘voyou’.
Alors, pour son implication dans un réseau de corruption destiné à cacher des cas de dopage en Russie, Lamine Diack a été condamné, le 16 septembre 2020, à quatre ans de prison dont deux ferme. Également reconnu coupable de corruption active et passive et d’abus de confiance, il est aussi condamné à une amende maximale de 500 000 euros (environ 330 millions de FCFA). Pourtant, en mai 2021, le célèbre Diack bénéficie d’une levée de la mesure d’interdiction de sortie du territoire français, contre le paiement d’une caution de 500 000 euros. Et, c’est son ancien club de football du Jaraaf dont il a été président à deux reprises qui, sous la houlette de l’ancien footballeur Cheikh Seck, joue pour faire sauter la caution.
Son retour au bercail – où il rêvait, après sa retraite de l’IAAF, aller à la mosquée, lire le journal et s’occuper de ses petits-enfants -, résonne comme une défaite sportive, un match perdu de la vie. Athlète de haut niveau, champion de France d’avant le ‘soleil des indépendances’, ancien député socialiste, Lamine Diack décède quelques mois après être rentré au Sénégal, en décembre 2021. Il avait 88 ans…
Lui qui est né à Rebeuss, précisément à la rue Mangin, angle Ambroise Mendy, a vu son nom sanctifié à Ndakaru. À l’initiative du maire de Plateau Alioune Ndoye, la rue du Général Charles Mangin a été rebaptisée rue… Lamine Diack. Dans un post Linked in, sentons le flot affectif de sa fille Anta Diack – qui a également perdu, mardi 15 juillet, un autre parent Pa Ass Diack « un éducateur, un pilier incontournable du football » – s’élever et effleurer la sensibilité de ceux qui ont connu et côtoyé l’ancien président de l’IAAF: « Dans le même souffle d’émotion, nous avons assisté ce samedi 19 juillet à l’inauguration de la rue Lamine Diack dans notre quartier familial de Reubeuss. Un hommage fort à un autre géant, dont le nom et l’héritage méritent d’être inscrits à jamais dans notre mémoire collective ».
Et ceci pour la fin. « En tant que fille, je n’ai pas les mots… Juste une immense reconnaissance et une douleur silencieuse face à la perte de ces références », termine Anta Diack, dans sa note mélancolique mais fort empreinte d’affection et de gratitude.
Cheikh Tidiane COLY Al Makhtoum