La justice burkinabé a condamné vendredi deux personnes dont un juge pour « tentative d’escroquerie » dans le cadre d’une affaire de corruption impliquant le maire de Ouagadougou, a-t-on appris samedi de sources judiciaires.
« Le juge Narcisse Sawadogo et Allasane Bagagnan ont été reconnus coupables de tentative d’escroquerie et condamné à 24 mois de prison dont 12 fermes et au paiement d’un million d’amende (environ 1500 euros) », a déclaré à l’AFP une source judiciaire, proche du tribunal de grande instance de Diebougou (Ouest) où s’est déroulé le procès.
« C’est une grande surprise pour moi parce que nous avions, tout au long de ce procès, démontré que la manoeuvre frauduleuse, qui est considérée comme un des éléments constitutifs du délit de tentative d’escroquerie, n’avait pas été prouvée par le parquet », a réagi Me Séraphin Somé, avocat du juge Narcisse Sawadogo. « On peut reprocher à mon client des mensonges mais pas une manoeuvre frauduleuse ayant pu conduire le Tribunal à reconnaître sa culpabilité pour ce délit (tentative d’escroquerie) », a-t-il estimé, regrettant cette sentence.
Pour Me Dieudonné Ouily, avocat de la partie plaignante, ce sont au contraire des « comportements très graves » qui ont été « sanctionnés ». En début juin, MM. Sawadogo et Bagagnan étaient entrés en contact avec le maire de Ouagadougou, Armand Pierre Béouindé, pour lui proposer « d’intervenir auprès des magistrats pour faire classer son dossier sans suite », contre paiement, selon le procureur Harouna Yoda.
Le maire de Ouagadougou a été mis en cause en février par le journal d’investigation « Courrier confidentiel », selon lequel son épouse et trois de ses enfants étaient actionnaires d’une société bénéficiaire d’un marché de la commune pour l’acquisition de 77 véhicules, estimés à 4,6 milliards de francs CFA (plus de 7 millions d’euros).
Le parquet avait ouvert une enquête à la suite d’un article paru dans le journal L’Evènement du 10 juin, intitulé « Poursuite judiciaire contre le maire de Ouagadougou, des magistrats sollicitent 70 millions de francs CFA (environ 106.000 euros) pour classer le dossier ». Lors de son élection en 2015, le président burkinabé Roch Kaboré avait promis de lutter contre la corruption, les détournements de fonds publics et les malversations financières.
Fin mai, Jean-Claude Bouda, ancien ministre de la Jeunesse (2016-2017) et de la Défense (2017-2018) avait été « inculpé pour faux et usage de faux, blanchiment de capitaux et enrichissement illicite », et placé sous mandat de dépôt.