[Tract] – Alors que les sportifs sont souvent la cible d’insultes et de racisme en ligne, de nombreux clubs ont décidé de boycotter ce week-end Twitter, Facebook et Instagram.
Harcelés et insultés sur les réseaux sociaux à la moindre contre-performance, ou parfois sans raison, juste parce que leur tête ou leur couleur de peau ne convient, semble-t-il, pas à certains «supporters», les sportifs en ont marre. Pour manifester leur mécontentement, et faire réagir Twitter, Facebook, Instagram et compagnie, clubs et athlètes ont décidé de dire stop et d’appeler au boycott. Pendant trois jours, il vous sera ainsi impossible de voir les tweets de votre équipe préférée, ou de liker sur Instagram le selfie victorieux d’après match.
Ce vendredi à 16 heures (heure française), tous les clubs anglais professionnels de football, féminins comme masculins, ont partagé une ultime publication, avant de laisser leurs comptes en suspens jusqu’à mardi, 0h59. «Nous joignons les clubs, joueurs et organisations en ce week-end de boycott des réseaux sociaux. Les abus et discriminations, quelle qu’en soit la nature, ne sont pas les bienvenues», peut-on lire sur les réseaux sociaux de Manchester United. «Assez c’est assez», est-il désormais écrit sur ceux du club d’Arsenal. De nombreux joueurs et fans y vont eux aussi de leur message personnel, qu’ils concluent tous par #StopOnlineAbuse (arrêtons les abus en ligne).
Mouvement international
Très répandu dans le football britannique, le mouvement a aussi été repris un peu partout en Europe. De nombreux pilotes de Formule 1 ont eux aussi annoncé boycotter les réseaux le temps d’un week-end, alors qu’un Grand prix à lieu au Portugal dimanche. Tout comme la Fédération française de rugby, celle de tennis, ou encore le Football Club de Nantes, dont l’un des joueurs avait été victime d’insultes racistes et de menaces de mort sur les réseaux début avril. Même l’UEFA, qui organise les différentes compétitions européennes de football (Ligue des champions, Europa League, Euro) a expliqué dans un communiqué soutenir le mouvement et mettre en veille ses comptes sur les plateformes.
Les vagues de harcèlement visant des personnalités publiques, et donc par défaut des sportifs de haut niveau qui sont fortement médiatisés, ne datent pas d’hier, mais elles ont eu tendance à augmenter depuis le début de la pandémie et la fermeture des stades. En février, dans une lettre ouverte adressée à Jack Dorsey, le PDG de Twitter, et à Mark Zuckerberg, celui de Facebook (qui possède aussi Instagram), les plus hautes instances du foot anglais avaient demandé aux plateformes d’en faire plus pour modérer les messages insultants, racistes ou discriminants visant les footballeurs. «Votre inaction a créé la croyance dans l’esprit des auteurs anonymes qu’ils sont hors de portée. Le flux incessant de messages racistes et discriminatoires se nourrit de lui-même : plus il est toléré par Twitter, Facebook et Instagram, plus il devient un comportement normal et accepté», taclaient-elles à l’époque.
Réseaux toxiques
Depuis, le ras-le-bol a pris de l’ampleur. Fin mars, Thierry Henry, le meilleur buteur de l’histoire de l’équipe de France de football et personnalité respectée au Royaume-Uni (où il a passé la majorité de sa carrière), a décidé de se retirer des réseaux sociaux. «Le volume considérable de racisme, d’intimidation et de torture mentale qui en résulte est trop toxique pour être ignoré», expliquait-il avant de clôturer ses comptes suivis par plusieurs millions de personnes, jurant ne pas revenir «tant que les personnes en charge de ces réseaux ne mettront pas en place des mesures pour réguler leur plateforme avec la même férocité qu’ils le font pour protéger les copyrights».
Un peu malgré lui, le champion du monde 1998 a lancé un mouvement. Interrogés, plusieurs joueurs s’étaient dits favorables à l’idée de se retirer – temporairement – des réseaux, à condition que ce soit dans le cadre d’une action commune et massive. Le 24 avril, les clubs et organisations de football du Royaume-Uni ont publié un nouveau communiqué, appelant donc à un boycott du 30 avril au 3 mai, dates de la 34e journée de Premier League. Conscients que leur action «n’éradiquera pas le fléau de l’abus discriminatoire en ligne», ils disent espérer qu’elle contribuera à «éduquer» les internautes et à faire réagir les géants de la tech et le gouvernement britannique.
Source: Libération.fr