(Sentract)- Tout vient à point pour qui sait attendre. Ce n’est pas Abdoulaye Thiam, plus connu sous le pseudo de « Boutiku Laye », qui dira le contraire. Artiste et chroniqueur, ce natif de Kaolack, après avoir fait dix ans dans le milieu du rap sans avoir de l’aura, est subitement révélé au grand public grâce à ses chroniques sur l’actualité nationale de manière générale et particulièrement sur l’équipe nationale du Sénégal. Il joint l’utile à l’agréable pour dompter Aliou Cissé et ses poulains sans les heurter.
Rappeur, Abdoulaye Thiam alias « Boutiku Laye », n’a pas convaincu les mélomanes. Il a fait dix ans dans le milieu du hip-hop sans s’imposer. Beaucoup de personnes ne le connaissaient pas. Mais Abdoulaye Thiam est devenu une star quand il a changé de registre. Ses textes de rap rangés aux tiroirs, il s’oriente vers les chroniques en développant, sur les réseaux sociaux, des sujets d’actualité qui attirent, séduisent et captivent. Il passe à la loupe les maux de la société, avec style et élégance. Sans exagération, ni arrogance. Sa célébrité remonte à la Coupe d’Afrique des Nations de 2019 grâce aux chroniques qu’il faisait sur les joueurs de l’équipe nationale. Ses vidéos étaient très attendues et devenaient virales aussitôt après leur publication. Son succès fut éclatant. En cette coupe d’Afrique des Nations qui se déroule au Cameroun, il a remis ça. Il est devenu le chouchou du monde sportif, adulé par les supporters des lions de la Téranga grâce à ses vidéos de moins de 5 minutes sur l’équipe nationale. Avec un bon scénario, sans heurter, il délivre son message avec une musique en sourdine, histoire de fouetter un peu l’orgueil les « Lions », en leur demandant de gagner leurs différents matchs afin de ramener la coupe. Ainsi, il a su s’imposer et se frayer un chemin dans le cœur des mélomanes.
Origine de « Boutiku Laye »
Né à Kaolack et résidant actuellement à Keur Massar (Banlieue dakaroise), Laye n’a pas choisi ex nihilo son surnom. Car, avant d’embrasser le rap, il tenait une boutique, appartenant à sa mère. La boutique se trouvait à la devanture de sa maison familiale à Kaolack. « Je suis un passionné de musique. J’y excelle mais, quand je n’ai pas d’activité relative à la musique, je passe mon temps à la boutique qui est un espace de rencontres. A travers la boutique, je connaissais quasiment ce qui se passait dans les différentes concessions. J’ai commencé à faire mes chroniques en free-style avec mon téléphone, selon l’actualité à partir de la boutique. Je les partageais avec les Sénégalais », explique-t-il. De fil en aiguille, Laye prend goût. Il lance son produit sur le net et boom. Sa première vidéo est devenue virale sur les réseaux sociaux. Les internautes sont séduits par le concept et adorent le thème qui y est développé. Les sites internet le surnomment le rappeur boutiquier. « J’ai trouvé que c’est un nom qui pouvait faire ma promotion. Du coup, je n’ai pas cherché loin. Je me suis dit que c’est un sobriquet qui peut faire un nom d’artiste », dit-il. Il poursuit : « J’ai fait dix ans dans le milieu du rap sans y être connu. Ce qui explique cela c’est que j’étais à Kaolack et le Sénégal à ses réalités. Accéder aux médias, n’est pas facile à Dakar à plus forte raison si vous êtes loin de la capitale. C’est lorsque que j’ai commencé à poster mes vidéos sur les réseaux sociaux avec des thématiques différentes développées que ma carrière a véritablement commencé à prendre un envol. Dieu faisant bien les choses, cela a coïncidé avec la période de la Can 2019. Après chaque match, je faisais une vidéo en s’inspirant des commentaires des Sénégalais sur la prestation des joueurs. Actuellement, je suis en train de travailler sur un son destiné aux Lions. Ce sont des chansons que je compose et que j’offre gratuitement aux Sénégalais. »
Artiste engagé, Thiam ne fait pas partie de ceux qui forcent le destin pour accéder au sommet. Patient, il travaille sans précipitation, avec sérieux et abnégation. « Je suis un artiste engagé qui n’est pas pressé. Il ne faut jamais forcer le destin. Aujourd’hui, je rends grâce à Dieu. On me sollicite de partout. Je n’ai plus le temps d’aller à la boutique alors que ça me manque énormément », dit-il.
Son inspiration
De taille un peu élancé, teint noir, un peu chétif, l’enfant de Kaolack est quelqu’un qui aime faire des recherches pour renforcer ses compétences. Il a hérité de son père son intelligence et sa curiosité. Celui-ci, se souvient-il, lui imposait de regarder le journal télévisé à l’époque. Et, se remémore-t-il : « parfois, dans la maison, il y avait des discussions, des débats entre nous. Chacun défendait ses idées. Je peux dire que, en partie, l’idée de faire des chroniques sur l’actualité m’est venue de là-bas. Ces débats m’ont beaucoup servi. Puisque dans mes chroniques je traite tous les thèmes : politique, culture, économie, société, sport ». Poursuivant, il informe que l’idée de faire des chroniques sur les « Lions » lui est venue lors d’un match catastrophique de l’équipe nationale du Sénégal. Ce jour-là, les supporters étaient dans tous leurs états. Les uns insultaient les joueurs, les autres criaient sur les joueurs. J’ai fait une vidéo pour tempérer les ardeurs tout taclant l’équipe, sans vexer ou heurter personne. Il dit ses vérités sans être vulgaire. « Je critique les lions dans mes chansons. Mais je le fais de manière correcte. Je n’utilise pas de propos déplacés. Car, mon souhait, c’est d’exporter ce que je fais à l’échelle internationale », renseigne-t-il. Selon lui, ce n’est pas facile de faire des vidéos tout le temps mais, artiste créatif, il tente, après chaque match, de se surpasser en concoctant quelque chose pour ses fans. « Le public est exigeant, attend toujours une nouveauté », dit-il, très conscient de la rigueur qu’il doit mettre sur ses textes. « Après chaque match, je prends 30 minutes pour écrire un texte. Le montage des vidéos prend une heure. Mes vidéos atteignent en l’espace de 24 heures plus 200 milles vue, sans compter les partages et les likes », se réjouit-il.
Son cursus scolaire
Abdoulaye Thiam a fait ses études primaires à l’école Samba Diack dans le quartier Boustane, à Kaolack. Après mon entrée en 6e il est allé au lycée Valdiodio Ndiaye. Mais, il n’a pas pu aller loin dans ses études. « J’ai arrêté mes études pour aider ma mère parce que la situation familiale n’était pas facile. Je regrette d’avoir quitté très tôt les bancs car l’éducation et le savoir sont importants pour un artiste », confie-t-il. Côté musical, le rappeur a une mixtape de 14 titres, faite à Kaolack en 2014, qu’il a réalisée avec son groupe SL (Silva et Laye), 100 degrés. « Actuellement, je suis en studio pour faire l’enregistrement d’un nouvel album. Pour le moment, je préfère taire le nom de cet opus. Mais ça sera un album pour la sauvegarde et restauration de nos valeurs qui ont tendance à disparaître », souligne-t-il.
Sentract Avec Besbi