SENtract – Les mouvements se font dans tous les sens au sein du domaine littéraire africain francophone. On remarque une plus grande visibilité des acteurs du livres, pas très connus il y a moins de dix ans sur cette partie du continent, tels que les agents littéraires, les communicants littéraires etc. Nous nous sommes donc entretenus avec Pauline Ongono bibliothécaire de formation, passionnée de lecture et d’écriture, qui vient de lancer « ACOLITT », une « agence de consulting littéraire » basée au Cameroun.
Dans cette interview, elle nous explique ce qu’elle entend par « agence de consulting littéraire » dans un univers qui découvre et qui a même du mal à intégrer dans son fonctionnement les agences littéraires de plus en plus en vue.
1-Pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, qui est Pauline Ongono ?
Merci à votre équipe pour cette opportunité d’expression. Je suis Pauline M.N. ONGONO, une Camerounaise amoureuse des livres. J’ai fait des études de bibliothéconomie et archivistique à l’ESSTIC[1] de Yaoundé ; je suis donc bibliothécaire et archiviste de formation. Pour être d’un plus grand apport, je me suis orientée dans d’autres domaines tels que la relecture, la communication littéraire. En outre, je fais l’effort de multiplier des actions pour promouvoir la lecture partout où je le peux.
2-Pouvez-vous partager votre parcours professionnel, qui peut être une source d’inspiration pour ces personnes qui veulent vous emboîter le pas dans ce très complexe monde de la littérature en général ?
La passion a toujours été mon leitmotiv.
Très jeune, je suis tombée amoureuse d’une bibliothèque, et j’ai voulu plus tard être bibliothécaire. Après mon baccalauréat, je n’ai pas réfléchi, j’ai fait le concours de l’ESSTIC de Yaoundé où j’ai occupé le premier rang d’ailleurs (Rire).
A ma sortie de l’ESSTIC, j’ai travaillé en bibliothèque mais il me manquait quelque chose : je voulais plus qu’entretenir des usagers et gérer le traitement des livres. J’ai donc créé le « Challenge 15 pages par jour », un challenge avec des adultes qui souhaitent être accompagnés afin qu’ils n’abandonnent pas après la première page ; et le « Challenge 6 pages par jour » pour les enfants. Un.e participant.e peut lire moins de pages par jour, mais l’essentiel est de ne pas laisser tomber.
Je relisais déjà des textes, mais je ne faisais que la correction des coquilles en réalité. En 2016, j’ai décidé de m’appliquer, et m’appliquer signifiait revoir mes cours de grammaire, revoir les reformes de la langue française, faire des recherches sur le domaine, et bien d’autres. Au début, je le faisais gratuitement ou presque. Aujourd’hui, je maitrise les contours de la relecture grâce entre autres aux conseils de Ray NDEBI, le co-fondateur de l’association littéraire Ônoan qui est, par ailleurs auteur, relecteur et traducteur. C’est désormais donc un service payant.
La communication-la promotion littéraire- est, elle aussi, une passion depuis plus de dix ans. Je l’ai faite pendant des années en solo, bien avant de créer un compte sur les réseaux sociaux (rire), puis avec des associations littéraires telles que Les accros du livre du jeune auteur et éditeur Aristide AYOLO, Ônoan et depuis peu ACOLITT et mon blog linelitt.wordpress.com
Depuis ce temps, je me suis faite des contacts au Cameroun, dans d’autres pays d’Afrique et au-delà. J’en profite pour remercier toutes ces personnes qui me font confiance et qui participent à mener à bien ces projets.
3-Qu’est-ce qui vous a motivée à vous lancer dans le domaine de la communication littéraire ?
Je me suis découverte de véritables passions. J’ai juste voulu apporter sérieusement du mien pour faire connaitre toutes ces personnes qui produisent et qui très souvent ne savent pas comment faire pour promouvoir leur art. J’apporte ma petite contribution… Si parler d’un acteur du livre peut lui apporter un plus, c’est la communauté littéraire qui gagne.
4- On remarque de plus en plus la création d’agences littéraires dans plusieurs pays africains. Est-ce vraiment le moment dans un contexte éditorial africain francophone encore en friche et non contractualisé ?
J’ai envie de vous demander quand est-ce que ce sera le moment ? (Rire). Faut-il attendre pour mener des actions ? A mon avis, non. L’agent littéraire à de nombreuses fonctions dont celle de porter haut l’auteur.e qui fait appel à ses services. Pourquoi ne pas alors créer une agence si l’on se sent des capacités à tenir ce rôle ? Jusqu’ici, les agents littéraires que je côtoie mènent à bien leurs tâches et leurs « clients » ne se plaignent pas, au contraire, ils foulent de meilleures sphères. Qui sait, c’est peut-être ce qui poussera à changer certaines mentalités liées à l’édition.
5- Vous avez créé ce que vous appelez «ACOLITT », une agence de consulting littéraire. Quel bilan faites-vous depuis le lancement de cette structure ?
ACOLITT n’a que 3 mois d’existence (Rire). Il est vrai aussi que ce n’est que la continuité de ce que je fais depuis des années… Depuis trois mois toutefois, j’ai été contactée par des auteur.es.s, des associations littéraires, des promoteurs d’évènements littéraires au Cameroun et en Afrique pour des partenariats, une campagne de communication selon le package de communication choisi, des communications ponctuelles et relecture… Bien sûr, plusieurs bénéficient aussi gratuitement de mes services. Un tel bilan en trois mois… Je suis plutôt satisfaite.
Je reste donc ouverte pour d’autres partenariats et pour d’autres accords de services.
6- Qu’est-ce qui différencie ACOLITT d’une agence littéraire ?
Une agence littéraire a bien plus d’exigences. Elle est un intermédiaire entre l’auteur et l’éditeur ; elle aide l’auteur dans son écriture, dans le choix de l’éditeur ; elle négocie ses contrats ; elle lui assure un suivi juridique et financier ; et la liste n’est pas exhaustive. Chez ACOLITT, nous proposons comme services la relecture, la communication littéraire (pour auteur.e, association littéraire, évènement littéraire), la traduction littéraire, et très bientôt, du Ghostwriting. La différence est donc visible.
7-L’une des missions de ACOLITT est de promouvoir les ouvrages des auteurs sur des plateformes numériques et en présentiel pour une meilleure visibilité. Quel est le climat du domaine éditorial de l’Afrique Centrale et du Cameroun en particulier, depuis que le circuit voit naître de « nouveaux acteurs » tels que des communicants littéraires et/ou des agents littéraires ?
Un éditeur m’a dit un jour : « Vos histoires-là vont rebeller nos auteur.es.s… » (Rire) C’est ça le climat auquel j’ai été confrontée jusqu’ici.
8-Jusqu’ici, quelles sont les difficultés auxquelles vous avez été confrontées ?
Je peux dire migrer du gratuit au payant. Heureusement, plusieurs comprennent l’importance de la chose (relecture, communication littéraire…) et les efforts qu’elle demande.
9- Comment les avez-vous surmontées ?
J’ai fait plusieurs travaux gratuits. Plusieurs personnes qui ont bénéficié de mes services me recommandent, et comme d’habitude, je me donne à fond pour que cette difficulté ne soit plus.
10- Pour sortir, quel message adressez-vous aux différents acteurs de la sphère littéraire africaine francophone en général, et camerounaise précisément ?
Comme d’habitude, je nous exhorte à prendre au sérieux la communauté littéraire en Afrique. Ailleurs, plusieurs choses se font parce qu’il y a une fédération entre les acteur.es.s du livre. Il ne s’agit pas de s’aimer forcément mais de se respecter et d’avoir un objectif commun : l’émergence de la littérature.
Merci Pauline.
Baltazar Atangan Noah dit Nkul Beti
Critique littéraire
(noahatango@yahoo.ca)
[1] ECOLE SUPÉRIEURE DES SCIENCES ET TECHNIQUES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATIon.
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