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[Stratégie du suspense] Qui de Macky Sall ou de son dauphin APR briguera 2024?

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Sentract, Tract du Sénégal- Calcul politique ou ruse ? Quoi qu’il en soit, le flou entretenu autour d’une éventuelle troisième candidature en 2024 pourrait être favorable au président de la République Macky Sall en tant que candidat de son parti ou de la coalition Benno Bokk Yaakar. Pour cause, plus on s’approche de l’échéance, plus l’étau se resserre autour des éventuels candidats ; supposés ou réels dans son camp. Une véritable stratégie de l’usure savamment orchestrée par le chef de l’Etat pour tenir à carreaux ses «alliés» qui ne pourront que constater les dégâts et contraints à se plier à l’accompagner dans sa volonté de briguer un troisième mandat. A leurs risques et périls.

Qui dans l’Alliance pour la République (APR) briguera les suffrages des sénégalais en 2024 ? Le Président de la République Macky Sall lui-même ou son dauphin ? Mystère et boule de gomme. Toutefois, le parti de la majorité est à pied d’œuvre pour la présidentielle. A quelques quinze mois de l’échéance et sans candidat officiellement déclaré, l’APR se tient prêt à mobiliser les militants. Le weekend dernier, dans un communiqué rendu public, elle a annoncé son objectif de vendre 1.500.000 cartes de membres sur toute l’étendue du territoire et de la diaspora. Ce, à travers la mise en place de nouveaux comités. Bien que le candidat de l’APR tarde à être connu, faudrait-il rappeler que dans l’exposé des motifs de la loi constitutionnelle n°2016-10 du 5 avril 2016 portant révision de la Constitution, il est écrit dans l’article 27 : «la durée du mandat du Président de la République est de cinq ans. Nul ne peut faire plus de deux mandats consécutifs ». Ce verrouillage de la Constitution, pour mettre le Sénégal à l’abri des troisièmes mandats, Macky Sall l’a toujours crié haut et fort.

«Le Sénégal est une démocratie qui fonctionne. En 2016, j’ai proposé au peuple sénégalais une révision constitutionnelle qui doit régler définitivement la question de mandats. Aucun président ne peut rester au pouvoir pour plus de deux mandats. C’est écrit noir sur blanc. Nul ne peut faire plus de deux mandats consécutifs », avait dit Macky Sall. Non sans le rappeler dans son ouvrage intitulé «Le Sénégal au cœur » qu’il présentait en 2018, un an avant sa réélection. Toujours sur cette question de limitation des mandats, la réponse en était de même avec Pr Ismaila Madior Fall, un des principaux rédacteurs de la Constitution. Cependant, les réponses de l’actuel Garde des Sceaux ministre de la Justice ne cessent de varier depuis qu’il a fait son entrée dans le gouvernement. Va-t-il encore brûler la robe ?

Pour l’heure, il s’est enfermé dans une ambiguïté proche d’une volte-face à plus de 360°. «Vous savez, la parole de Ismaila Madior Fall, c’est de la doctrine. La doctrine est une opinion à travers laquelle un professeur émet son opinion. La doctrine n’est pas une source du droit (sic). Donc, moi je ne suis pas habilité à dire, à décréter, à décider avec l’autorité de la chose jugée, si le Président peut faire un troisième mandat ou non. J’ai donné une opinion doctrinale dans un contexte donné. Maintenant, il y a un nouveau contexte, il faut laisser le Président se prononcer sur la question», a déclaré le Professeur en Droit constitutionnel dans l’émission «Jury du dimanche», sur I-Radio, le 9 octobre dernier. Les deux anciens premiers ministres Aminata Touré et Mahammed Boun Abdallah Dione avaient également défendu la limitation du mandat et c’est sur cette base qu’on avait convaincu les Sénégalais à adopter cette Constitution. Quant à la députée Mimi Touré, elle maintient toujours sa position.

L’ARTICLE DE LA DISCORDE

Malgré ces déclarations, l’article 27 sèmerait encore la confusion. D’aucuns pensent qu’il offre la possibilité d’un deuxième mandat quinquennal indépendamment du septennat consommé même si Macky Sall avait juré que la Constitution a tout bloqué. Sauf qu’aujourd’hui, tout concorde qu’il envisage de faire un troisième mandat à travers les actes posés. D’ailleurs, il n’a pas été tendre avec tous ceux qui soutenaient qu’il ne peut pas briquer un troisième mandat. Moustapha Diakhaté, l’ex-président du groupe parlementaire de Benno Bokk Yaakaar Moustapha Diakhaté et Sory Kaba alors directeur des sénégalais de l’extérieur ont été virés pour avoir défendu cette thèse contre le 3ème mandat. Ironie du sort, ceux qui défendent l’idée contraire, sont promus et de fil en aiguille, les discours de ses proches changent comme pour promouvoir un troisième mandat. A ces actes qui permettent de soupçonner que Macky Sall veut briguer un troisième mandat, s’ajoute le délit d’ambitions au sein de son parti. En effet, au lendemain de sa réélection en 2019, tous ceux qui étaient suspectés d’avoir des ambitions présidentielles, ont été limogés du gouvernement. On peut citer les ex ministres Amadou Ba, Aly Ngouille Ndiaye, Mouhamadou Makhtar Cissé etc. Allant plus loin, Macky Sall avait même supprimé le poste de Premier ministre sous le fallacieux prétexte d’une gouvernance en mode fast-track malgré toutes les polémiques. Mais, à l’épreuve du temps, ce fast-track va se transformer en stand by. Certains observateurs finissent par en déduire qu’il ne s’agissait là, ni plus, ni moins que d’un brouillage des pistes pour une éventuelle candidature. Pour preuve, il va remettre en selle le poste quelques mois plus tard en choisissant Amadou Ba. Toutefois, c’est le Chef de l’Etat lui-même qui contrôle presque tout l’appareil gouvernemental. En atteste, la rencontre avec le patronat qu’il a dirigé lors d’un conseil présidentiel.

GAGNER DU TEMPS EN MAINTENANT LE SUSPENSE

Le temps file mais l’effet recherché reste le même. Macky Sall continue de laisser planer le doute sur sa candidature. L’APR n’a toujours pas annoncé son candidat et les partis alliés comme le Parti socialiste (PS) et l’Alliance des Forces du Progrès (AFP) de Moustapha Niasse observent impuissamment la scène plus que surréaliste. L’ancien président de l’Assemblée nationale qui avait fait ses adieux à l’Assemblée nationale reste toujours proche du Président de la République qui vient de le nommer Haut Représentant du Chef de l’Etat, un poste qui n’existait pas dans la nomenclature administrative sénégalaise, à l’instar de celui d’Envoyé spécial du Président de la République qu’il avait créé pour «calmer» Aminata Touré. En effet, les partis alliés de la majorité sont phagocytés. Pour preuve, le PS ne dispose aujourd’hui que de six députés, contre plus d’une vingtaine précédemment. Pendant ce temps, Macky Sall déroule son agenda. La stratégie de l’usure en bandoulière, il donne le tournis à ses proches qui ne savent plus où donner de la tête. Au finish, les partis alliés qui n’auront plus le temps nécessaire pour préparer leur candidat et aller à la rencontre des populations pour les convaincre alors que des candidats de l’opposition sont déjà sur le terrain, vont finir à accepter le fait déjà accompli. Pour ne pas perdre le pouvoir, ils vont être contraints de «parrainer» la très risquée candidature de Macky Sall et tenter leur chance pour que la coalition ne puisse éclater.

L’EQUATION SONKO

Alors que Khalifa Sall et Karim Wade sont pour le moment écartés de la présidentielle de 2024 après avoir été condamnés pour malversations financières, aujourd’hui le leader du parti Pastef Ousmane Sonko reste la seule menace sérieuse du parti au pouvoir. C’est pourquoi d’aucuns pensent que le projet de loi d’amnistie pour Khalifa Sall et Karim Wade annoncé par le Président de la République Macky Sall pour leur permettre de recouvrir leurs droits civiques, est faite pour diviser l’opposition. Pour cause, le vote d’une telle loi rendra possibles leurs candidatures en 2024. Ce qui va entrainer une reconfiguration politique s’ils décident de se présenter bien vrai que le processus du vote de la loi prendra le temps qu’il faut. Du coup, cet élargissement du champ politique ne serait pas sans conséquences pour l’opposition. Arrivé troisième lors de la présidentielle de 2019 avec 15% des voix, le maire de Ziguinchor ne cesse de gagner du terrain au Sénégal et dans la diaspora. Son parti s’est illustré lors des dernières élections locales et législatives en remportant plusieurs mairies et en obtenant plusieurs députés avec la coalition Yewwi.

Toutefois, il a une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Accusé de «viols répétitifs» par une jeune masseuse, il risque gros face à la justice accusée à tort ou à raison d’être à la solde du régime en place. Une réactivation du dossier avec un procès pornographique pour salir son image et/ou le condamner pourrait faire l’affaire à Macky Sall. Le cas échéant, il sera le seul maître à bord. A moins que d’autres personnalités sortent du bois pour se dresser contre sa troisième candidature. Il y a déjà des signes avant-coureurs avec l’annonce faite par l’ancien ministre de la santé et de l’action sociale, Abdoulaye Diouf Sarr ; sans occulter les cas Aminata Touré, Aminata Tall etc. C’est dire que rien n’est gagné d’avance. 2024, la bataille sera épique. Certains y laisseront des plumes.

Sentract (www.sentract.sn)

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