[Interview ] Brunch littéraire à Nantes:« Ce festival est né sous mes yeux », Christine Elong 

Sentract – Christine Elong est une romancière camerounaise vivant à Nantes, en France. Auteure de deux romans, en autoédition (Piégée par mon sang et Mexico), elle prendra part à la septième édition du Brunch littéraire, festival des Littératures africaines à Nantes, qui se déroulera du 3 au 5 novembre 2022, sous le thème : « Construire une identité : écrire le soi ».

 

Bonjour Christine Elong, comment allez-vous ?

Bonjour. Je vais très bien, merci. 

Que recherchez-vous en prenant part à un pareil festival ?

Ce que je recherche? Je ne sais pas si je recherche quelque chose en particulier. Je vais y prendre part simplement. L’idée est de rencontrer de nouvelles personnes qui, comme moi, ont la passion des lettres. L’idée est d’échanger, de me faire connaître, de présenter mes œuvres. J’ai d’ailleurs souvent fait de très belles rencontres, précédemment. C’est un cercle, où on rencontre des visages connus, et surtout de nouveaux visages chacun dans sa ligne éditoriale,  dans son genre littéraire. C’est souvent très riche en diversité et passionnant en même temps. Et puis, il y a surtout la communauté des lecteurs avec qui les échanges sont souvent intéressants.

Quelle sera la nouveauté de votre présence à ce festival ?

La nouveauté pour moi lors de ce festival sera la présentation de ma récente publication, Mexico

Ce festival est né sous mes yeux il y a quelques années et je ne portais pas encore la casquette d’écrivaine. J’y allais comme dans un voyage de découverte. J’écoutais simplement les prestations des artistes présents. Aujourd’hui, je me félicite d’avoir « grandi », d’être de l’autre côté, celui des artistes invités, des participants. 

«Construire une identité : écrire le soi» est le thème du festival. Quel sens donniez-vous à cette thématique ? Et quel regard portez-vous sur son traitement et sa perception par le public qui prendra part au festival  ?

Il s’agit d’un thème très important et riche qui a le mérite de nous amener à réfléchir sur nous, de parler de nous en profondeur par rapport aux autres, et aussi de parler de nous par rapport à l’environnement dans lequel nous vivons. Je pense que c’est un sujet qui mérite réflexion et qui doit être partagé avec nos adolescents surtout tous ceux vivant à l’étranger. Parler de la construction de l’identité renvoie à parler de l’affirmation du soi, du développement de notre ego et aussi de notre réalisation personnelle. Construire une identité signifie parler de l’individu, de ses choix. Le public ne pourra tirer que des enseignements et nous aussi puisque c’est une construction que nous vivons tous les jours, partout où nous nous trouvons, dans nos interactions avec les autres. Comprendre qui nous sommes par rapport à l’autre. Connaître notre identité, mieux nous connaître pour mieux comprendre ceux qui nous entourent. 

Pensez-vous que l’avenir de la culture, et en particulier de la littérature, soit dans l’interaction, la rencontre avec les artistes ?

Je suis d’accord de parler de l’avenir de la littérature. La culture c’est quelque chose que nous devons préserver, nous devons travailler pour ne pas la perdre, c’est notre essence même. La littérature est un moyen de transmission et peut-être aussi de conservation, jusqu’à un certain niveau puisque tout ne se retrouve pas dans les écrits. Il existe d’autres moyens de transmission. À tous les niveaux, il y a toujours interaction, que ce soit au niveau culturel qu’au niveau littéraire. Lorsqu’on écrit, on s’adresse à son lecteur, au monde extérieur, c’est une interaction. De même, la culture se transmet, elle est surtout la caractéristique d’une communauté. Les artistes, eux, se rencontrent, car ils partagent la même passion. Il y a une sorte de connexion qui les lie.

Dans cette septième édition, il y a une volonté d’innover et de faire preuve d’originalité ?

Comme dans toutes les éditions ou dans toutes les initiatives, l’idée principale est toujours celle d’innover. Il faut pouvoir se vendre, il faut présenter quelque chose de bien, d’original dès lors qu’on s’adresse à un public ; sinon à quoi bon? Ne pas avoir en tête d’innover ne produira qu’un résultat médiocre. Et aujourd’hui, plus que jamais, le monde et les hommes sont de plus en plus exigeants. 

Revenons sur ta carrière, Comment tout ça a démarré ?

Ma carrière? Tout a commencé il y a bien longtemps. Avant d’avoir écrit quoi que ce soit, j’étais déjà écrivaine dans ma tête. C’est à partir de l’an 2015 que j’ai décidé de prendre mon envol. Timidement, mais j’étais déterminée. Et en 2019, j’ai publié mon premier roman, Piégée par mon sang.

Ce festival est parmi les premiers du genre en France, et partant dans la ville de Nantes. Peut-on établir un parallélisme entre la France et le reste de l’Afrique Subsaharienne dans le domaine de la littérature ?

Si ce festival est parmi les premiers, bravo aux organisateurs. Je ne peux qu’encourager d’autres personnes à prendre exemple. Il est très important pour nous d’apprendre à nous valoriser, à  valoriser notre culture, nos artistes, à nous mettre en avant. Nous avons de la matière revendre. L’Afrique est tellement riche. Nous perdons tellement de temps à débattre et à faire des choses de moindre intérêt. Je sais qu’il y a pas mal d’actions qui sont menées ça et là pour mettre en avant notre littérature, mais ça reste des initiatives principalement privées. Les artistes musiciens se battent comme ils peuvent, les écrivains, les peintres. S’ils ne sont pas accompagnés par quelques organismes présents sur place, il leur revient de tout faire sans soutien. Et c’est à ce niveau que les choses se compliquent ; car, parfois, ça nécessite des moyens considérables. À combien revient le SMIC dans nos pays pour qu’un artiste puisse lui-même soutenir ses frais de lancement et suivre sa carrière? En France, tout est déjà organisé à la base. La région, les communes suivent étroitement toutes les activités culturelles qui se déroulent sur leurs espaces. Ils mettent même à disposition les salles, le matériel, des fonds et je vais vous surprendre, ils mettent en place un calendrier annuel où vous ( les associations) pouvez vous inscrire pour des activités. Tout ceci dans le but de mettre en avant la culture en lui donnant une bonne place, de faire vivre la ville, d’intéresser les populations aux activités de la ville. Il n’est donc pas surprenant de voir le maire ou son conseiller ou encore un adjoint de la ville visiter un stand installé par une association lambda. Il y a un suivi réel, un accompagnement sérieux. Et tout ceci sous un climat sécuritaire bien élaboré. Personnellement, je ne sais à quel niveau établir le parallélisme. Commençons par nous intéresser à nos événements, et surtout, l’Etat doit être plus présent et mettre les moyens.

Selon vous, existe-t-il une littérature africaine ou des littératures africaines ?

Pour moi, il existe une littérature tout simplement. Et chaque écrivain écrit en fonction de sa langue, de ses connaissances, de son inspiration, de sa culture, de ses goûts, de ses aspirations, de ses voyages, de ses croyances, de sa région du monde. Rien ne s’invente. On part toujours de quelque chose qui existe. 

Vous avez récemment publié Mexico. Quelle a été l’inspiration de ce roman ?

Mexico est un roman que j’ai beaucoup aimé écrire. C’est une grande histoire d’amour. J’avais effectué un voyage et je suis tombée amoureuse d’une terre, d’un peuple. Il s’agit du Mexique. Mon voyage a été comme une initiation, c’était comme atteindre le bout du monde, un endroit où la terre s’arrête. J’ai trouvé un pays magnifique avec sa culture, ses couleurs, son histoire, ses danses, sa particularité et j’ai voulu le raconter dans un livre. 

De quoi parle-t-il, et où peut-on le trouver au Cameroun ?

C’est un roman qui raconte l’exil, le voyage, la découverte, l’amour. C’est un roman profond dans lequel chaque Homme pourrait retrouver un bout de lui-même. Et je vous invite simplement à le lire pour découvrir le Mexique et ses couleurs.

 

Comment s’est déroulé le processus créatif de ce roman que plusieurs lecteurs apprécient et qualifient même de « pépite littéraire » ?

Curieusement, je n’ai pas pris beaucoup de temps pour écrire  Mexico. Tout a été fait de manière très spontanée. Vous savez, quand vous tombez sous le charme de quelque choses, les idées affluent. C’est un peu ce qui s’est passé. L’histoire s’est constituée au fur et à mesure que je la mettais sur écrit. Cette fois,  je n’avais pas de plan prédéfini. Je suis partie une fois. Et je me souviens que certains collaborateurs me reprochaient de ne pas prendre assez de temps pour tout peaufiner.

Quels sont vos projets à venir ?

Mes projets? J’en ai tellement. Je suis sur plusieurs fronts au même moment. Puisque je suis aussi passionnée de peinture. Le troisième roman, lui, est déjà en bonne voie. (Rires)

 

Propos recueillis par Baltazar Atangana Noah