Au Sénégal, élire un président de la République, revient souvent à chasser le titulaire du poste sans tenir compte du programme, des compétences et du profil.
Depuis que nos élisons des présidents de la République, aucun débat national pour questionner de fond en comble la forme d’organisation, que nous avions adoptée après les indépendances. Nous avions transposé le modèle français, sans tenir compte de nos propres symboles et références. En tout état de cause, nous sommes une république et/ou une “nation”, qui doit élire un président d’une république, qui est tout sauf sénégalaise.
Nous avons l’ambition de contribuer ici à dresser le profil idéal, que se doit d’avoir le prochain président sénégalais, pour ne pas reproduire l’erreur fatale commise en 2012.
Une alliance d’intérêts contradictoires, (réunis seulement par la détestation contre Abdoulaye Wade) composée d’imams marcheurs, de rappeurs embourgeoisés et affairistes, de journalistes pressés de jouir des fastes du pouvoir, de puissances économiques étrangères gênées par le patriotisme du père de la démocratie sénégalaise, a mis à feu et à sang le pays en désignant Abdoulaye Wade comme la source de tous les maux dont souffrait le Sénégal. La sentence fut lourde. Maitre Wade fut chassé avec une violence inouïe. Hélas, les Sénégalais ont élu à sa place un OPNI (objet politique non identifié), rompu aux manœuvres politiciennes mais, qui par ses attitudes, (in)décisions et actes, n’a jamais réussi à habiter les habits de président de la République.
Il y a des qualités et dispositions impératives pour aspirer à diriger le Sénégal, pays sous-développé, riche d’importantes ressources pétrolières et gazières, avec un capital humain très jeune mais hélas mal préparé par une éducation nationale si négligée et si abandonnée.
Nul besoin d’établir un ordre d’importance des qualités ou des dispositions requises, ni d’indexer à chacune des catégories, un quelconque poids, qui leur conférait plus ou moins une importance relative. A charge au lecteur, de réaliser ce travail afin d’en sortir, le meilleur profil (selon lui) pour être un bon président de la République Sénégalaise. République véritablement sénégalaise. Et non pas seulement République du Sénégal.
Certains objectent qu’en l’état actuel du pays, il faudrait renverse la table et qu’on change de système. Qu’on évite de substituer au personnel politique actuel un autre qui, si l’on n’y prend pas garde, risque de reproduire les mêmes tares ou pire encore, d’accélérer la descente en enfer, du peuple martyr sénégalais. Nous y répondons ici.
Nous demandons au lecteur de concéder aux impétrants, le droit à l’erreur passée et d’accepter, qu’un point de vue sur un individu, pour une situation donnée, en un instant donné, ne peut guère demeurer, pour toujours, l’unique critère par lequel un candidat sera déclaré apte ou inapte au poste de président de la République Sénégalaise.
Passons donc au cœur du sujet. Sans prétendre faire une étude exhaustive de la question, ni être dénué de parti pris.
De toute évidence, présider aux destinées du Sénégal impose au chef d’incarner la nation (nation que nous ne sommes pas encore complètement) avec une parfaite connaissance de son Histoire et du corps social. Le Sénégal n’était pas une page vierge avant l’arrivée des colons. Un président de la République doit connaître l’histoire de son pays, la vivre et l’incarner.
Un président de la République Sénégalaise ne doit pas utiliser les moyens de l’Etat pour menr une campagne électorale déguisée au rythme d’inaugurations d’édifices inachevés et financés par un endettement sans fin et une prétendue croissance dont tous les dividendes sont réexportés vers l’étranger par les multinationales qui s’accaparent les secteurs clés d’économie avec le blanc-seing du président sortant. Non, un président ne doit pas hypothéquer l’avenir des générations futures.
Un président de la République Sénégalaise ne doit, ni sponsoriser des soirées musicales, ni danser en public. La lourdeur de la tâche et la solennité de la mission lui interdisent d’avoir une attitude d’amuseur public sorti de sa nonchalance, un intermittent dans le spectacle, spectacle en totale contradiction avec la nécessaire empathie vis-à-vis des nombreux Sénégalais dans la maladie ou dans la détresse morale et matérielle. Non, un président ne doit pas danser en public.
Un président n’est ni le Khalife général (d’une confrérie), ni le.cardinal (d’une congrégation) et surtout pas le secrétaire général (d’un syndicat d’intérêts). Il représente toute la nation, qui reste à construire et à parachever. Le Sénégal d’aujourd’hui est encore, hélas, une juxtaposition d’ethnies, de communautés sociales et de confréries auxquelles la principale allégeance du citoyen est faite. Mais pas une nation solidement constituée et homogène, du moins pas au sens universaliste du terme. Un président se doit d’être rassembleur, pour catalyser les diversités en unité nationale, qui est le seul levier sur lequel peut construire un Etat souverain. Et non pas être une personnalité clivante, qui a fini de diviser le peuple en camps retranchés les uns contre les autres, comme l’a si bien « réussi » au bout de sept années le président sortant.
Un président de la République Sénégalaise ne doit pas se glorifier de son sang, au point d’évoquer la pureté de la lignée de ses ancêtres guerriers, comme il nous a été donné de l’entendre du sortant Macky Sall. Pourquoi dès lors se réclamer de la République qui ne fait aucune distinction, entre le sang d’un « roturier », d‘un prétendu esclave ou d’une passéiste extraction de noblesse ? Un président doit avoir une grande capacité de résilience pour pardonner les insultes et les avanies.
Un président de la République Sénégalaise ne doit, ni penser que le dessert donné aux tirailleurs sénégalais était un privilège que nos « maîtres » français nous accordaient, ni imaginer que les investisseurs étrangers risquant leur capital dans une «Afrique pauvre et handicapée», doivent être accueillis comme des sauveurs ayant le droit de s’essuyer les pieds sur ce continent meurtri et absent à la table où la marche du monde se décide. Un président doit être digne.
Un président de la République Sénégalaise ne doit pas ignorer le sens du Magal de Touba ni buter sur le terme de «salatoul fatihi» (psalmodié des milliers de fois par jour au Sénégal) devenu un patrimoine national enraciné dans la culture religieuse sénégalaise. Oui, un président doit disposer d’un minimum de culture endogène.
Le prochain président de la République Sénégalaise doit être celui qui a opéré une synthèse harmonieuse entre l’école sénégalaise héritée de la colonisation et l’école historique des daaras. Ces deux systèmes continuent de produire deux types de sénégalais et deux types de citoyens de cultures différentes et contradictoires sur certains points fondamentaux de la vie de la nation. S’il existe au Sénégal un système, qu’il faut urgemment changer, c’est bien le système éducatif. Nous voulons une éducation nationale véritablement sénégalaise tant sur les contenus que sur les approches pédagogiques. Un président doit parfaitement connaître ces deux systèmes éducatifs.
Un président de la République Sénégalaise doit avoir une expérience dans la gestion d’une collectivité locale ou d’une mairie pour ne pas se retrouver dans le cas de figure de Monsieur Macron avec ses gilets jaunes. Il dirige un peuple qu’il ne connaît pas. Le manque d’expérience d’une part, le mépris envers ses adversaires d’autre part, l’ont plongé dans une impasse, dont il tente de sortir en organisant un débat national aux allures de “ndeup national”. Quelle leçon pour notre pays ? Un président ne doit pas mépriser ses adversaires politiques.
Le prochain président de la République Sénégalaise doit avoir un programme réaliste et réalisable, pour ne pas se retrouver dans le cas de figure du septennat finissant, avec un “yoonou yokkuté” abandonné au bout de deux ans (2 années de tâtonnements et d’expérimentations hasardeuses) pour passer à un PSE (Plan pour Servir l’Etranger, selon nous) sur commande et mal agencé pour le Sénégal qu’il mènera inéluctablement vers la faillite et ancrera dans la dépendance vis-à-vis de l’étranger. Un président mal préparé et élu par défaut, venu au pouvoir par génération spontanée et du fait d’une ambition née de frustrations, est forcément une calamité.
Le prochain président de la République Sénégalaise doit avoir une équipe diverse, soudée et compétente, avec des personnalités faisant surtout le sacrifice de leurs politiques personnels pour mettre en avant les seuls intérêts supérieurs du Sénégal, afin de ne pas reproduire la situation actuelle d’un l’attelage gouvernemental caractérisé par sa pléthore de ministres aux compétences discutables. Un président doit être un bon manager, en même temps qu’un leader naturel.
Enfin, le prochain président de la République Sénégalaise doit impérativement panser les plaies béantes occasionnées sur le corps social par la loi sur le parrainage (aucune femme candidate, aucune candidature issue des partis de la gauche sénégalaise) et par les procès politiques instrumentalisés contre Khalifa Sall et de Karim Wade. La morale exclut qu’on utilise la justice pour combattre ses adversaires.
Ce qui précède conduit à identifier comme le choix naturel, le seul bon choix de vote utile pour mettre le meilleur candidat aux responsabilités de président de la République : le candidat Idrissa Seck. Pour que nous accédions enfin à l’instauration d’une République véritablement Sénégalaise, dont nous pensions qu’elle adviendrait en 2012, avec l’élection d’un Président né avec les indépendances africaines et produit de l’école sénégalaise. Ce qui n’a -hélas !- pas été le cas avec le président sortant.
Plus qu’une explication entre adversaires politiques candidats à la fonction suprême, l’élection présidentielle du 24 février 2019 est- enfin !- l’occasion unique et historique de la rectification tant désirée de la trajectoire de la pirogue Sénégal. Dans le sens de l’Histoire. Son Histoire.
Mamadou Seck
Membre du Pôle Communication de la CECAR (Cellule des cadres de Rewmi)
Membre de And Baaxal/ SOPEMA pour élire le Président Idrissa SECK