ET DIT TÔT – Beau retour en zone, dans une zone très politique, réussi par Aminata « Mimi » Touré. Et ce retour en zone, qui serait une faute en sport, est plutôt un magnifique dunk dans l’actuelle conjoncture des astres du régime Benno Bokk Yaakar du président Macky Sall. En effet, avec la disparition de la Primature, le Conseil Economique, Social et Environnemental (re)devient la troisième institution du pays, dans l’ordre protocolaire et de préséance républicaine. La deuxième étant l’Assemblée nationale. Avec un Moustapha Niasse, P.A.N (président de l’Assemblée nationale) au crépuscule de sa vie politique, Mimi Touré devient donc numéro 2 officielle dans l’ordre de succession du président de la République, dans le cas où une vacance du pouvoir ou un empêchement du président Macky Sall ouvrirait la voie à un intérim.
Mimi Touré est donc totalement de retour dans les bonnes grâces du président de la République, qui l’aura mis au régime pain sec pendant une lustre. Comme pour tester son endurance et sa loyauté. Mimi Touré, de super ministre de la Justice traquant les accapareurs de biens mal acquis du régime Wade, puis second Premier ministre de Macky I, avait fini réléguée à la fonction ésotérique d’envoyée spéciale du président. Envoyée où? Nul ne le sait
Mais elle aura su serrer les dents et attendre les vents favorables. Celle qui a été la directrice de campagne du candidat Landing Savané à la présidentielle de 1993 est une fausse technocrate et une vraie politique. Elle sait qu’avaler des couleuvres et traverser le désert est la marque de fabrique des hommes (et femmes!) d’État qui parviennent au sommet.
Avec un art consommé de la dissimulation de son dépit, Mimi Touré avait ainsi continué de ferrailler contre l’opposition pour défendre le blanc panache de son président de la République et président de parti Macky Sall. Et des signaux d’adoubement sont finalement venus: Macky Sall en a fait (à nouveau, comme en 2012) la coordinatrice de son directoire de campagne pour la présidentielle de 2019. En la nommant, hier mardi 14 mai, présidente du CESE, Macky Sall en fait de facto la numéro 2 de l’APR et une sérieuse postulante au dauphinat présidentiel en 2024. Pour autant que les Sénégalais soient prêts à élire une femme à la tête du pays. Cinq ans c’est loin. Et Mimi Touré a le temps de se préparer a cette échéance, depuis une position forte et imprenable. Son plus sérieux adversaire à la position de numéro 2 de l’APR était Amadou Bâ. Ce dernier a été exfiltré par le haut, passant de puissant ministre de l’Économie et des Finances, au département d’inauguration des chrysanthèmes que sont les Affaires Étrangères. Amadou Bâ est donc neutralisé, tout comme l’a été Alioune Badara Cissé, après ses vélléités de s’imposer en numéro 2 au début du premier mandat de Macky Sall, avec sa placardisation à la Médiature, institution qui aboie quand les caravanes passent.
Mimi Touré réussit ce qu’ont échoué à faire deux autres amazones de la politique et qui de ce fait, ont été obligés de quitter leur parti respectif : Aminata Tall du temps où elle était au PDS, à qui Abdoulaye Wade président avait préféré Idrissa Seck qu’elle ne pouvait voir en peinture. Et Aïssata Tall Sall, exclue du PS pour avoir osé envisager un avenir autre que celui de parti -croupion de la majorité présidentielle qu’Ousmane Tanor Dieng a conféré au parti de Léopold Senghor. Ironie du sort ? Mimi Touré est propulsée au devant quand Aminata Tall, qu’elle remplace, est envoyée faire valoir ses droits à la retraite politique et qu’Aïssata Tall Sall, ralliée désormais au camp présidentiel, n’est plus qu’une parmi la centaine et quelques de députés godillots de la majorité présidentielle. En attendant un hypothétique décret présidentiel qui la nommerait à une haute station. Mais les places sont prises et les places sont chères. Bilan de ce mercato politique? Mimi Touré est désormais sous les feux de la rampe et sur la rampe de lancement, quand Aminata Tall et Aïssata Tall Sall sont (ou se sont mises) sous l’éteignoir.
Macky n’en est qu’au début de son dernier quinquennat. Mais pour sa succession, il faudra désormais compter avec Mimi Touré.
Damel Mor Macoumba Seck
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