Tract – Je prends la plume, motivé par l’indicible indignation qui gronde en moi et une fraternité qui réclame son dû, pour m’adresser à vous alors que refroidissent et se dispersent dans la nature les cendres de celui qui a été notre frère, notre ami, notre compatriote.
En ces heures où la tristesse vous accable et où l’incompréhension sème ses ombres sur nos consciences, il est de notre devoir de faire jaillir la lumière de la vérité et de la justice.
Chers parents de C.F., votre fils, dont l’âme repose désormais loin des tourments de ce monde, a été l’objet d’une inqualifiable barbarie. Son dernier asile, profané par des lâches, crie vers nous l’injustice d’un acte qui révolte le cœur et l’esprit. Cet acte, qui a voulu nier son humanité, a, en vérité, révélé la nôtre, dans ce qu’elle peut parfois comporter de plus sombre.
Mais c’est bien là, dans cette nuit de l’âme, que nous devons allumer les flambeaux de l’espoir et de la fraternité. Car, mes chers amis, si nous laissons l’ignorance nous diviser, si nous permettons à la haine de bâtir des murs entre nous, nous ne serons plus dignes des lumières de notre terre sénégalaise, ni de l’héritage de nos ancêtres.
Je vous en conjure, ne laissons pas la peur de l’autre éroder notre humanité. Ne laissons pas la cruauté de quelques-uns dicter la loi de notre cœur. C’est en tendant la main, en ouvrant notre esprit, que nous honorerons véritablement la mémoire de C.F. et de tous ceux qui, avant lui, ont été martyrisés par l’ignorance et le fanatisme.
Je vous appelle, non avec la voix d’un juge, mais dans une supplique, en frère, à élever nos âmes au-dessus de la mêlée, à regarder dans les yeux de notre prochain et y voir non pas un étranger, mais un reflet de nous-même. Car ce qui a été fait à C.F., dans un élan de folie collective, puisque c’en était assurément une, est une tache sur notre conscience nationale, un rappel que le chemin vers la lumière est semé d’embûches et d’erreurs.
Nous devons, ensemble, forger un avenir dans lequel de tels actes ne seront plus qu’un lointain souvenir, une page sombre de notre histoire que nous aurons définitivement tournée. Il nous faut bâtir un Sénégal où la diversité est une force, où l’amour triomphe de la peur, où la justice élève chaque citoyen sans distinction.
Puisse cette lettre ouverte être le catalyseur d’un nouvel élan, l’étincelle qui rallume dans nos cœurs le feu sacré de la solidarité et de la fraternité humaine. Avec le souffle de nos ancêtres et la force indomptable de notre volonté, œuvrons pour que jamais plus une telle abomination ne se répète sous nos cieux.
Que la paix enveloppe votre famille, que la sérénité trouve le chemin de vos cœurs, et que le souvenir du martyre posthume de C.F. nous insuffle à tous le courage de changer.
En communion avec votre douleur et avec l’espoir d’un monde meilleur.
Gorgui Kafindia