Ah les dimanches de cette époque-là. Moi, le Dimanche, c’était mon jour préféré, bien que c’était pas jour de repos à Ndawene. On se levait tôt comme tous les autres jours, et en avant pour le grand ménage hebdomadaire. On savait tous ce que nous avions à faire depuis la veille. Une équipe pour le lavage de la cuisine, une autre, le grand balayage de toute la maison avec les moindres recoins et les menues tâches de rangement. Mais, ce qui rendait agréable l’atmosphère, c’était le disque des auditeurs. Cette émission avait deux parties, une en Français, avec généralement les tubes en vogue de nos orchestres, une autre, en Wolof, avec les morceaux de notre folklore national et Africain.Dans la première partie, celle des branchés, qu’on appelait les ‘’assimilés’’, y avait deux dames dont je me souviens, une certaine Héléne Harley et une Nicole Sarr qui animaient l’émission. Elles avaient des voix suaves, et roulaient bien les ‘’R’’, pas comme nos animatrices de maintenant qui zézayent. Les animateurs de cette époque senghorienne, devait avoir dans leur formation, des cours de diction. On avait en tous cas, du plaisir à les écouter. Donc, les gens branchés envoyaient des dédicaces à leurs chéris (es). C’était pour certains, à la limite des déclarations publiques d’amour. On y dédiait une chanson à la personne de son choix, et ça donnait à peu près ceci : « De la part de Badou pour Tata Ndeye Ndiaye, de la part de Michou et Agnès pour leur Tonton Jean Baptiste, de la part de Marcel pour sa marraine Renée , de la part de Mbagnick dit Elvis pour sa Sylvie adorée, etc, etc…
Nous allons écouter ‘’Diaraf’’ de l’orchesta Baobabs avec Laye Mboup disait la voix. Ou même quelques fois, des tubes en vogue de chanteurs étrangers comme Johnnie Hallyday ou autres Boney M. en tous cas, le public branché moderne, occupait la partie ‘’Française’’ de l’émission.Puis, venait la partie Sénégalaise, avec El hadj Mansour Mbaye. Là, c’était les chansons de l’ensemble Lyrique traditionnel de Sorano avec les Khar Mbaye Madiaga, Sombel, Khady Diouf etc…. Je crois que son indicatif, c’était ‘’Laye Niakh’’ de Mada Thiam. C’était Moussa Diomandé Kamara, fabricant d’eau de javel, à la rue Escarfait x Grasland qui tenait le haut du pavé. Il faut dire que l’auditeur avait la possibilité d’envoyer autant de dédicaces qu’il le voulait. Lui, ne s’en privait pas.Le ‘’disque des auditeurs’’ était une espèce de tribune d’amours et d’amitiés. Les gens y exprimaient leurs sentiments, ce qui plongeait les auditeurs dans une atmosphère de Paix et de concorde. C’était, à mon avis, un aspect, pas perçu, mais, non négligeable.
L’après-midi du Dimanche, c’était le sport. Les ‘’attaquements’’. ‘’Cogne’’ contre ‘’cogne’’ ou quartier contre quartier. Bon, à cette époque pas si lointaine que ça, les montres n’étaient pas des jouets, elles étaient des objets de luxe, et ceux qui en possédaient, les adultes, ne les mettaient pas facilement à la portée des jeunes. Donc, le temps d’un match, c’était au nombre de buts marqués. Trois pour la mi-temps. Six, pour arrêter le match. ‘’3 : mi-temps, 6 : tass’’ disait-on. Ça pouvait donc tirer en longueur un match de football.
Mais, c’était sans compter avec l’émission ‘’Echos des stades’’, si je ne me trompe, avec son fameux morceau générique de Gilles Sala. ‘’tanrarara ra tarane tarane taranraran ran taranetarane’’. Je ne sais pas comment vous avez fait pour ne pas connaître ce morceau ? Mais, dès qu’on l’entendait, on savait que c’était le son de glas de cette belle journée de Dimanche. Avant qu’on se le dise, que la maman ou la sœur, les empêcheuses de prolonger en rond, vous lançaient ‘’Hé, vous ne venez pas prendre vos douches et réviser vos leçons? Ba niou fekk lenn lenn fofou rek’’. Alors, en attendant son tour pour se faire propre. La chaîne Nationale, l’unique radio de cette époque, nous faisait faire le tour des stades du Sénégal. Balabas Diallo à Ziguinchor, Laye Diaw et Sa thiombi à Kaolack, Golbert Diagne à St-louis, Sory Birama Dabo à Tamba, Laye Niang, Pathé Dieye Fall ou Magib Sène à Dakar, et j’en oublie, nous faisaient vivre les envolées des grands gardiens tels Amady Thiam de la Ja, Demba Mbaye du Jaraaf, Amady de l’Asfa entre autres, et les buts magnifiques de Mbaye Fall, Badou Gaye, Babacar Ba pelé, et autre Matar Niang et consorts.A cette époque, le dimanche, on ne se réveillait pas avec une gueule de bois.
Vous l’avez peut-être remarqué. C’étaient Musique, Sport et Etude