Trois semaines après avoir été accusé dans un reportage de la BBC sur la gestion du pétrole et du gaz au Sénégal, le frère de Macky Sall a annoncé ce lundi 24 juin sa démission de la Caisse des dépôts et consignations, à la tête de laquelle il avait été nommé en septembre 2017 par le chef de l’État. Dès le début de l’affaire, Aliou Sall avait exclu de démissionner et promis de porter plainte contre la BBC. Au final, il n’ a pas porté plainte et a juste saisis le médiateur de la BBC pour se plaindre du reportage.
Pression de la rue, de l’opposition sénégalaise, Aliou Sall a donc fini par céder. « Il est de mon devoir de laver mon honneur sali, de protéger les miens », explique Aliou Sall dans une longue lettre rendue publique ce lundi, dans laquelle il affirme être aujourd’hui « l’ennemi public numéro un ». Et c’est pour protéger ses intérêts et ceux du Sénégal qu’il démissionne de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) qu’il dirigeait depuis septembre 2017. « C’est une campagne visant à me « déshumaniser » (…), à me présenter comme un « personnage sans foi ni loi qui nargue un peuple exsangue », écrit-il.
Aliou Sall, cela a été dit par Ousseynou Nar Gueye, directeur de publication de Tract.sn, dans l’émission TV de Walf TV Actu en 7 oû il était invité ce samedi 22 juin, n’avait plus d’autre choix que la démission de la tête de la CDC. Pour mettre à l’aise son frère le PR Macky Sall dont il a euthanasié le dialogue politique mort- né avec son affaire pétro- gazière et aussi pour être à même d’être audible dans la ligne de défense qu’il s’est choisi : » je suis innocent et blanc comme neige ». J’observe 3 choses: il marque un but contre son camp car tout le camp présidentiel (APR, ministre porte parole du gouvernement , le quotidien gouvernemental le Soleil, etc) était contre toute idée de démission d’Aliou Sall. Ensuite, même dans sa lettre de démission, il continue de mouiller son président de frère dont il dit qu’il connait le « moule de vertu et d’humilité dans lequel ils ont été élevés » tous les deux et donc qu’il le sait innocent. Et enfin, il a choisi de théatraliser sa démission en se faisant filmer par un média complaisant (Dakaractu pour ne pas les citer), vétu d’un boubou immaculé et jurant la main sur le Coran qu’il est innocent. Aliou Sall veut donc continuer de livrer la bataille de l’opinion. Il reste maire de Guédiawaye. Mais si on est cohérent au sommet de l’État, il ne peut plus rester président de l’association des maires du Sénégal. Et meme pour la mairie de Guédiawaye, s’il est mis en cause par la justice sénégalaise, le gouvernement doit le démettre de la tête de la mairie comme cela a été le cas pour Khalifa Sall. Sinon, on serait dans du deux poids, deux mesures.
Pour ce qui est de la mobilisation, je pense qu’elle va se poursuivre : elle est menée à la fois par des politiciens sans mandat électif comme Abdoul Mbaye, Thierno Alassane Sall qui ont donc intérêt à trouver là une tribune en attendant les élections locales de décembre, par des opposants avec mandat électif qui ont refusé de participer au dialogue national et au dialogue politique de Macky Sall: i.e Ousmane Sonko qui joue là un troisieme tour de la présidentielle et bientôt rejoint par Abdoulaye Wade, et enfin menée par la societé civile dont Y en a marre qui demande la transparence et la fin de l’affairisme d’État dans les contrats pétroliers et gaziers. Sans geste fort de Macky Sall (comme par exemple contraindre BP a publier son contrat avec Timis comme l’Etat du Senegal a publié le sien), la mobilisation se poursuivra.
En juin 2012, peu après sa première élection, le président Macky Sall avait confirmé la décision de son prédécesseur, Abdoulaye Wade, d’attribuer l’exploitation des deux champs pétroliers et gaziers off-shore à Petro-Tim, une société détenue par l’homme d’affaires Frank Timis. Dans un reportage diffusé le 3 juin, la BBC affirmait notamment qu’Aliou Sall avait reçu en 2014 un pot-de-vin de 250 000 dollars de la part du groupe Timis, où il avait en outre été engagé après l’arrivée de son frère au pouvoir.
Aliou Sall a toujours affirmé n’avoir jamais touché 250 000 dollars de Frank Timis, mais sa défense a commencé à se fissurer la semaine passée lorsqu’un conseiller du président, El Hadj Hamidou Kassé, a indiqué sur le plateau de TV5 que le virement avait bien été effectué et qu’Aliou Sall avait perçu des honoraires en tant que consultant en agriculture.
Le frère du chef de l’État a donc fait le choix de démissionner, de prendre les devants, mais il réaffirme qu’il n’a rien à se reprocher : « Toute cette malheureuse controverse n’est entretenue qu’autour d’un tissu d’amalgames et de contrevérités ».
Et Aliou Sall est d’ailleurs visiblement prêt à répondre à la justice puisqu’il indique être en phase avec la décision de l’Etat d’ouvrir une information judiciaire : « Fort de la conviction profonde que demain il fera jour, et que la lumière finira d’avoir raison des ténèbres, je prends ici devant vous la décision de donner ma démission », conclut-il.
Aliou Sall remercie enfin son frère : « Monsieur Le Président de la République qui, au-delà du même sang que nous partageons, sait, mieux que quiconque, dans quel moule de vertu, de sagesse et d’humilité nous avons été éduqués ensemble, comprend les actes que je pose en ce moment précis. »
Aliou Sall n’est donc plus directeur de la Caisse des dépôts, mais il conserve en revanche son poste de maire de Guédiawaye. C’est en tout cas le premier fusible, la première démission officielle dans cette affaire de pétrole et de gaz qui secoue le Sénégal. Comme par réaction, Macky Sall a décuplé l’activité de son stylo présidentiel ce mardi, en nommant le remplaçant d’Aliou Sall à la CDC (Cheikh Ahmed Tidiane Ba), et notamment, en barricadant à double tour la communication de la présidence : deux bretteurs et rhéteurs de haut vol reviennent, apré avoir été remerciés du dernier gouvernement. L’habile et teigneux Seydou Gueye devient ministre conseiller en communication de lq présidence de la République. L’hâbleur et pointilleux Abdou Latif Coulibaly est propulsé porte-parole de la présidence. Sans Premier ministre, Macky Sall est bien conscient qu’il doit déqormais multiplier les pare-feux et fusibles autour de lui.
Damel Mor Macoumba Seck (avec agences et radios)