Tract – La Tabaski est fête pour les uns, un don de soi, un sérieux et crucial sacrifice personnel pour les pères et responsables de famille. Pour les autres, elle est enrobée d’un effluve de supplice. Car à Sunugaal, même en pleine crise économique partout décriée, ne pas s’adonner à l’égorgement du mouton constitue un déshonneur familial, un sacrilège communautaire.
Pourtant, cette tradition religieuse est surérogatoire quand l’évaluation de vos propres finances ne peut vous le permettre. Dès lors que l’immolation de la bête cause autant d’épreuve dans la gestion des charges quotidiennes à venir, vous êtes exempté. Alors pourquoi s’entêter à vouloir vaille que vaille tirer le diable par la queue pour tenir le bélier par les cornes?
Mais pourquoi donc, à beau entendre partout cette fameuse rengaine du goorgoorlu ‘dëkk bi doxul’, on se surmène toujours pour acheminer le mouton chez soi ? Certains oseront vous dire en profiter parce qu’ils n’ont pas assez dégusté de viande rouge toute l’année, autant que la blanche du reste aussi chère à Sunugaal. Alors, la Tabaski devient l’occasion pour cette catégorie de se goinfrer en famille. On décrétera un congé traditionnel pour se prélasser au village – en ville également – et pendant des jours, on fera la peau jusqu’aux os à ce mouton qui a fini mitonné en chipotant avec les parents et autre mbokk.
Toutefois, beaucoup de responsables de famille sont à plaindre, parce que bien plus victimes que les moutons immolés. Ils se démènent comme de beaux diables avant le rituel mais, à la première goutte de sang sacrificiel, ils sentent perdre eux-mêmes leurs âmes qui, accompagnant celle du bélier tué, se brassent déjà dans l’humus des surendettés pour finir dans le caveau des sacrifiés. Ils ne mangeront presque pas de cette viande, parce que leur cerveau, envahi par le ‘déchiffrement des dettes contractées’ pour la fête, ne permet plus l’irrigation de leurs papilles gustatives. Les barbecues et autres ‘toufé’ assaisonnés et suintants, roulés entre moutarde et confit-piment, ne peuvent leur donner l’eau à la bouche.
Rien n’y fait, ils sont à sec dans un Sénégal exposé au surendettement qui n’a pas la même ‘aada’ que le Maroc où réside l’ex-président Macky Sall. Pourtant dans ce pays si cher au couple Sall et smala, le roi Mohammed VI, pour des raisons sociales et économiques, a demandé aux populations – mieux loties que les sénégalais – de surseoir à sacrifier, cette année, le mouton.
Qui ose réclamer cela à nos compatriotes ? Surement pas Macky Sall et son épouse Marième Faye Sall vivant leurs nouvelles citoyenneté et marocanité au-delà du Sahara. Ndeysaan, l’ex-première Dame, avait l’habitude à l’occasion de la tabaski de ‘Servir le Sénégal’ – nom de sa fondation – en moutons à gogo aux quatre coins du pays. Et l’argent circulait à tout va au petit bonheur de plusieurs familles. A ces bons souvenirs pour certaines personnes, s’est muée une situation délétère d’accusation de dilapidation de nos deniers publics. L’actuel pouvoir nous fait savoir que le Sénégal qui semblait marcher à la queue leu leu pour chercher le mouton chez Marième Faye Sall, vivait dans l’illusion avec «une dérive incontrôlée de la masse salariale, une explosion de la dette et de ses intérêts, ainsi qu’une gestion des subventions totalement chaotique» dans des «manipulations volontaires et cachées, entraînant une explosion incontrôlée de la dette». Et voilà, c’est dit, c’est résumé, on n’aperçoit plus la queue du démon…
Mais, la justice à travers le Pool judiciare et financier (Pjf) se fait entendre en cherchant cet appendice caudal du diable pour nous tirer d’affaire. Et bien avant la tabaski, des têtes sont tombées comme celles de Farba Ngom, Mansour Faye ‘goro’ de Macky, de Tahirou Sarr autre gendre de l’ex-chef de l’Etat… Combien sont-ils à être poursuivis pour biens mal acquis ? La liste est longue – avec le traitement de plusieurs dizaines de dossiers et l’arrestation de plus d’une centaine de personnes -, les milliards s’amoncellent en caution. Voilà pourquoi avec les bruits qui courent pour hisser Macky Sall à l’Onu ne trouvent pas caution auprès des nouvelles autorités.
Surtout pas avec Adjaratou Mimi Touré et sa collègue Mme Yacine Fall qui n’entendent pas se sacrifier à cette… moutonnerie. Elles veulent tuer dans l’œuf cette rumeur ‘baladeuse et tâteuse’, en mettant à nu toute les maroquineries faites de nos biens et ressources non sans dénombrer les autres crimes commis par leur ex-mentor, sa famille, son fiston, ses ‘goros’, ses camarades et alliés.
Par Cheikh Tidiane COLY