[INTERVIEW] Josiane BIDZOGO: ‘Sortir les jeunes de nos villages de la précarité’

Tract – Entretien avec Yvette Josiane BIDZOGO, fondatrice et dirigeante du cabinet conseils PROLOGISTICS AND TRADE SARL depuis 12 ans, et gérante du centre de formation agricole rural dénommé ECOLE FAMILIALE RURALE de NLONG ZOK au Cameroun.

 

Présentez-vous à nos lecteurs…

Je suis BIDZOGO Yvette Josiane, camerounaise. Titulaire d’un Diplôme d’Ingénieur des Industries de transformation obtenu à l’ENSAI de NGaoundéré au Cameroun et d’un DESS en management des entreprises obtenu au CESAG de Dakar Sénégal.

Fondatrice et dirigeante du Cabinet Conseils PROLOGISTICS AND TRADE SARL depuis 12 ans, je gère les activités d’un Centre de formation agricole rural dénommé ECOLE FAMILIALE RURALE de NLONG ZOK depuis 2 ans.

Pourquoi avoir créé école familiale rurale de Nlong-Zok? Vous êtes parti de quel constat ?

En réalité, c’est ma défunte maman qui a eu l’idée de créer ce centre de formation. Et j’en ai repris la gérance après son départ brusque en 2021.

L’idée de sa création part du constat que les jeunes des zones rurales ont moins de chance de non seulement poursuivre les études après l’obtention du CEP du fait de la pauvreté des familles, et aussi qu’une fois adulte il n’ont pas d’autre choix que l’exode rural, la conduite des mototaxis ou alors creuser du sable ; des métiers non seulement dangereux mais qui ne leur permettent pas de sortir de la précarité.

C’est ainsi qu’il a été pensé de mettre sur pieds un Centre de formation agricole proche de ce type de population, Centre qui pourrait leur permettre non seulement d’acquérir des compétences en agriculture, élevage et autres, mais aussi de les accompagner dans leur insertion sociale et professionnelle au sein de la communauté.

Présentez-nous vos offres de formation…

Le Centre est agrée par le Ministère de l’emploi et la formation professionnelle et propose un cycle de 02 ans avec obtention du Diplôme de Qualification Professionnelle (DQP), un cycle plus court de trois mois avec obtention du Certificat de Qualification Professionnelle (CQP).

Nos spécialités actuellement sont : Production végétale (agriculture) et production animale (élevage)

Nous offrons aussi des formations à la carte de quelques jours dès l’année 2025

Il est à noter que nos formations sont des formations dites par alternances. Un système de formation fondé sur une phase pratique (70% du temps) et une phase théorique (30% du temps) qui alternent. La pratique est notre maître mot afin de s’assurer de la parfaite maitrise des techniques agricoles.

Nous disposons d’ailleurs d’une ferme intégrée où nos apprenants ont la latitude de pratiquer leur futur métier d’exploitant agricole. Elle est gérée presque entièrement par les apprenants qui y pratiquent non seulement l’élevage (poulets, porcs et bientôt lapin), mais aussi l’agriculture (cultures maraichères, production des PIFs de plantains, Cacaoculture, arbres fruitiers, pépinières…)

Comment intégrer cette école ?

L’admission à l’école se fait sur étude des dossiers pour toute personne, dont l’âge est supérieur à 16 ans et a au minimum le CEP (Certificat de d’Etudes Primaires).

Vous avez des ambitions assez élevées et souhaitez vous positionner comme une grande école, mais avez-vous les enseignants et des partenariats pour mener à bien cette ambition ?

Effectivement, nous souhaiterions nous positionner comme les leaders de ce type de formation pratique dans le domaine agricole très bientôt et nous ne ménageons pas nos efforts pour y parvenir.

Notre équipe de moniteurs est constituée de jeunes Ingénieurs sortis des meilleures écoles agronomiques du pays, qui font montre d’un dévouement admirable. Cependant, nous sommes toujours à la quête de partenariats qui pourraient booster nos activités. Mais en attendant, nous sous efforçons, avec nos modestes moyens de donner le meilleur de nous-mêmes pour mener à bien notre mission qui est celle de former et accompagner l’insertion de nos jeunes.

Quand on intègre une école on recherche aussi un réseau d’anciens. Quelle est la promesse de l’école familiale rurale de Nlong-Zok ?

Très bonne question. Le problème avec ce type d’école est toujours le ‘après’ formation.

Nous avons une approche innovante sur cette question, car nous avons mis sur pieds une société coopérative des anciens apprenants dénommée la Coopérative simplifiée des anciens apprenants de l’EFR (SCOOP –AAE) de Nlong Zok. Elle est en cours de légalisation auprès des services compétents.

C’est cet organe qui se charge justement de la gestion de la ferme de l’école au travers des activités génératrices de revenus (AGR). A noter aussi qu’à compétences égales, les anciens apprenants sont prioritaires et bénéficient des postes au sein de l’école. D’ailleurs, à compter de la prochaine année académique, le futur Directeur du Centre sera un ancien apprenant.

Quand on intègre une école aussi jeune que la vôtre, on peut se poser la question de sa pérennité et de sa notoriété auprès des recruteurs… Existerez-vous encore dans 10 ans?

Notre vœu est non seulement de perdurer avec le temps et ce malgré les nombreuses difficultés, mais même de croitre.

Nous avons la conviction que les métiers liés à l’agriculture sont les métiers de demain. L’agriculteur qui pratique une agriculture pensée et bien structurée n’a rien à envier à un fonctionnaire. Regardez les prix actuels du Cacao au Cameroun et ailleurs.

Nous sommes submergés de demande en main d’œuvre qualifiée issue de notre Centre de formation et nous n’arrivons même pas à la satisfaire.

Certes les difficultés ne manquent pas, mais il y a vraiment fort à faire et surtout il est plus que gratifiant de contribuer à sortir un jeune de la précarité et le voir prendre ses marques dans la vie au travers d’un métier noble.

Quelle est la part de l’international dans votre cursus ?

Bien que nous ayons l’ambition de nouer des partenariats gagnant-gagnant avec des partenaires à l’international, il n’y a pour l’instant rien de concret. Nous y travaillons et communiquons sur nos réseaux toutes nos activités, un jour certainement cette ouverture pourra se faire.

 

Propos recueillis par Baltazar Atangana

noahatango@yahoo.ca