Le géant malaisien Karex, qui fabrique un préservatif sur cinq dans le monde, a été durement touché par les restrictions, et il s’attend à une baisse de production de 200 millions de préservatifs par rapport à la normale de mi-mars à mi-avril. L’entreprise, qui fournit des contraceptifs à de nombreuses compagnies et gouvernements ainsi qu’à des programmes humanitaires, a dû fermer temporairement ses trois usines malaisiennes au début du confinement. Le groupe a depuis été autorisé à reprendre la production, mais avec seulement 50% de sa main d’œuvre habituelle pour l’instant.
Comme les autres fabricants dans le monde sont confrontés à des difficultés similaires pour fabriquer et livrer les préservatifs, l’offre mondiale chute, a prévenu le directeur exécutif de Karex. « Le monde va sans aucun doute faire face à une pénurie de préservatifs, a-t-il expliqué à l’AFP. C’est une inquiétude majeure, puisque les préservatifs sont un article sanitaire de première nécessité. » Il se dit particulièrement inquiet pour la fourniture de préservatifs aux pays en voie de développement.
Des craintes pour les populations les plus pauvres
Dans les couloirs de l’ONU, on s’inquiète de cette situation « désastreuse ». L’agence onusienne chargée de la santé sexuelle et reproductive (Fonds des Nations unies pour la population, UNFPA) a averti qu’elle ne pouvait obtenir que 50% à 60% de ses livraisons habituelles de préservatifs à cause des perturbations liées au virus. « Les fermetures des frontières et les autres mesures de restriction perturbent le transport et la production dans plusieurs pays et régions », a indiqué un porte-parole du UNFPA, qui a dû trouver de nouveaux fournisseurs en urgence.
L’agence, qui collabore avec les programmes de planning familial, souligne que le principal problème est de pouvoir livrer les préservatifs aux communautés les plus pauvres et les plus vulnérables, les plus à risque si les stocks sont épuisés. « Une pénurie de préservatifs, ou de n’importe quel contraceptif, pourrait déboucher sur une hausse des grossesses non désirées, avec des conséquences désastreuses pour la santé et le bien-être d’adolescentes, de femmes et de leurs partenaires et familles », a souligné le porte-parole. L’UNFPA craint aussi une hausse des avortements risqués et un bond des maladies sexuellement transmissibles, notamment du VIH.
Alors même que les usines à l’arrêt et la fermeture des frontières chamboulent l’approvisionnement en préservatifs, la demande semble, elle, décoller. Depuis le confinement, Karex a vu ses commandes augmenter, selon son directeur exécutif. Des médias indiens ont rapporté que les ventes de préservatifs avaient bondi de quelque 30% la semaine suivant l’annonce du confinement dans ce pays de 1,3 milliard d’habitants.
La Chine à la rescousse
Face aux risques de pénurie, des signaux positifs parviennent cependant de Chine, qui semble avoir réussi à contenir l’épidémie. Les principaux producteurs chinois de préservatifs ont repris leur activité après que les autorités ont assoupli les restrictions pour empêcher la propagation du virus.
HBM Protections, qui fabrique plus d’un milliard de préservatifs par an, a annoncé que son niveau de production était revenu à la normale et qu’il comptait tripler ses capacités de fabrication d’ici la fin de l’année.
Le groupe Shanghai Mingbang Rubber Products, orienté vers le marché chinois, s’est quant à lui dit prêt à augmenter ses livraisons de préservatifs à l’étranger, en cas de pénurie. « Si les marchés internationaux rencontraient de tels problèmes, nous serions d’accord pour exporter plus », a indiqué à l’AFP le dirigeant du groupe, Cai Qijie.
Tract (avec médias)