En plus de l’angoisse maladive et de la détresse économique causées par le coronavirus, d’autres problèmes politico-sociaux s’ajoutent à l’ambiance pesante et morbide au Sénégal. Les bavures policières se multiplient et s’enchaînent dans cette période particulièrement difficile, et font ressurgir un malaise social. Etat.
Ces actes et pratiques barbares sidérants qui laissent indifférents les gouvernants et qui n’interpellent jamais la responsabilité de la police, ne sont que la suite d’une série de « violences policières » ou « de contrôles de police ciblés et violents », que des habitants, surtout des quartiers populaires, subissent depuis très longtemps. Depuis le début de la pandémie, des vidéos choquantes ont été diffusées sur les réseaux sociaux, notamment une vidéo montrant un groupe de policiers tabassant à mort des jeunes. Ou celle où l’on voit des policiers, sans plaques, sans matricule, certainement pas formés, dans la maison d’un imam, humiliant et bastonnant un jeune devant toute sa famille.
Une République autoritaire et policière
La violence est devenue un élément de la pratique sociale. L’expression. Une obsession. Un réflexe. Un moyen de traduire la volonté du président Macky d’incarner une République autoritaire et policière. Une violence illégitime, inégale, qui se couvre et couve derrière la fonction de faire respecter la loi, de maintenir l’ordre et d’assurer la sécurité et l’ordre publiques, et derrière l’éventualité d’un usage de la force quand il faut ramener l’ordre, l’utilisation de la force légitime. Mais celle à laquelle on a affaire au Sénégal est identitaire, incarnée, abusive ! Une vraie bavure !
Dans leur grande inquiétude sociale et économique liée au Coronavirus, les quartiers populaires sont aussi confrontés à des faits d’agressions policières. Le plus grave, c’est qu’il semble cautionné par la majorité de la société, que ces catégories n’ont pas de droits, les droits élémentaires que devraient leur assurer les pouvoirs politiques. Où est la police des policiers ?
Coronavirus prétexte à toutes les exactions
(…) Evidemment tout est flou ! Qui a le droit de circuler, qui ne l’a pas ? Seuls Macky et ses policiers le savent. Et comme le dit Hugo : » rien n’est solitaire, tout est solidaire ». Macky est Solidaire de ces violences. Les bousculades, les attroupements devant les arrêts de bus, les boulangeries, pour ne pas avoir affaire aux policiers, avant 20 heures parce qu’il y a le couvre-feu, et parce que les policier matraquent, à la trique, augmentent les risques de contracter la maladie par les fameux « cas contacts ».
Il faut dénoncer et riposter contre ce traitement brutal et impuni, de la police envers les habitants des quartiers populaires. Car cela met également en évidence les importantes inégalités sociales et économiques entre les différentes zones d’habitation au Sénégal. Des comportements qui ne sont pas acceptables ont été vus et pointés. Cette violence policière polymorphe est sidérante, ainsi que la complicité coupable des élites et gouvernants. C’est la revendication absurde par l’Etat du monopole de la violence légitime !
Obligés d’être confinés dans de petites surfaces et subissant d’importantes difficultés économiques qui se sont aggravées pendant cette période, de nombreux jeunes dénoncent impuissamment les injustices et discriminations devenues encore plus flagrantes pendant ce putain d’état d’urgence !
A défaut de dénoncer ces drames, d’avoir même essayé, le Sénégalais bien-pensant a pris le parti de l’indifférence face à ces problèmes sociaux majeurs. Une forme de résignation, d’impuissance, d’irresponsabilités mêlées, qui choque par le nombre de victimes. Et en plus de cela, les principes constitutionnels et les mécanismes et exigences de contrôle juridictionnel sont totalement absents. Il faut une police des polices indépendante, c’est une urgence.
Ces « violences policières » sont aujourd’hui justifiées par un état d’urgence, qui est dans son essence-même la suspension de l’État de droit. Si l’État de droit est un équilibre entre respect des droits fondamentaux et sauvegarde de l’ordre public, l’état d’urgence, c’est le déséquilibre revendiqué au profit de la sauvegarde de l’ordre public. Cet état d’urgence, c’est la violence pure de l’État qui entretient une relation ambiguë avec le Droit.(…) Mais aussi un culte de la violence que la société sénégalaise doit revoir et travailler.
Un fantasme de violence de nos policiers.
Avec ou sans leurs uniformes dépareillés, leur absence totale ou presque de savoir-faire, de pédagogie et de dialogue, la volonté de mater, de faire mal, de régner par la matraque, ces hommes se défoulent avec véhémence et démence. Des vidéos circulent qui montrent des policiers qui ne semblent pas du tout investis de la mission de gardien de la paix mais plutôt de celle d’en découdre, pour éprouver un autre acquis social célébré : la virilité exacerbée. La force ! La violence inutile et bête ! Une vraie culture de la violence, un mal qui ronge la police sénégalaise depuis des années. Une prise de conscience pour changer la doctrine du maintien de l’ordre devient urgente. On attend des forces de l’ordre la plus grande déontologie, l’usage juste et proportionné de la force.
Malgré le fait que des policiers ont toujours utilisé la force répressive, la violence gratuite, dans un sentiment d’impunité total, l’état d’urgence favorise une atmosphère sécuritaire et prépare les esprits à recevoir sans s’en apercevoir. C’est pourquoi il est légitime d’appeler ce qui se passe actuellement au Sénégal une dictature présidentielle, parce que les contrôles parlementaire et juridictionnel n’existent pas. L’épidémie de coronavirus n’a fait qu’aggraver les fractures sociales et économiques dans le pays, et les choix, décisions et mesures que le gouvernement a pris pour gérer la situation sont autoritaires et injustes socialement.
Babacar Beuz Diedhiou
Journaliste / communicant
France
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