[ ET DIT TÔT ] Kouadio Konan Bertin, dit « KKB », un des quatre candidats à l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, a appelé mardi les électeurs à voter alors que l’opposition a mis la pression sur le pouvoir en prônant un boycott actif du processus électoral.
« Déserter les urnes n’est pas la solution, je l’ai toujours dit et je répète. Je demande une seule chose aux Ivoiriens: qu’ils aillent voter » samedi, a affirmé cet ancien député de 51 ans, connu pour sa gouaille.
Dissident du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, principale formation d’opposition), il a été temporairement exclu de sa formation pour s’être présenté contre le candidat du parti, l’ancien président Henri Konan Bédié, 86 ans.
« Vous voulez mettre un terme à la gouvernance d’Alassane Ouattara. C’est votre droit et c’est tout à fait légitime. Mais je vous propose de le faire dans les urnes le 31 octobre plutôt que d’aller dresser des barricades pour essuyer des balles », a-t-il dit.
KKB avait refusé de se rendre à la première réunion où Bédié et Affi Nguessan, les deux autres candidats de l’opposition, avaient appelé à un boycott actif du processus électoral. KKB avait justifié son absence par le fait qu’il n’ait pas reçu l’ordre du jour de cette réunion politique. Est-il « l’idiot utile » du président sortant, qui sera conforté par la participation active d’au moins un opposant, KKB et de ses partisans, pour légitimer l’élection ? Ou encore est-ce une stratégie solo de KKB qui espère faire un score à 2 chiffres honorable qui en fera l’alternative jeune pour son ancien parti, le PDCI, qu’il pourrait chercher à préempter après cette présidentielle du 31 octobre, car le patron et candidat du parti d’Houphouët Boigny, 86 ans dont 60 ans de vie politique, sera bien obligé de raccrocher les gants après sa défaite très probable (puisqu’il boycotte). Devant la jeune garde du PDCI qui piaffe dans les paddocks (Jean-Louis Billon et compagnie), KKB veut prendre une longueur d’avance et la pole position dans la course à la captation du PDCI post- Bédié.
KKB s’était déjà présenté au scrutin présidentiel de 2015 contre l’avis de son parti qui avait alors choisi de ne pas présenter de candidat, soutenant la réélection d’Alassane Ouattara. KKB avait terminé 3e mais avec seulement 3,88% des voix.
La campagne se déroule dans un ambiance tendue avec des violences qui ont fait une trentaine de morts depuis le mois d’août et l’annonce de la candidature du président Ouattara, 78 ans, à un troisième mandat controversé.
Cette semaine, Ouattara s’est dit disposé à donner un poste de vice-président de la République à Bédié, pour calmer les choses. Mais Bédié n’a pas donner suite à la demande de rencontre qu’il avait lui-même exprimé en direction de Ouattara, par intermédiaire.
Elu en 2010, réélu en 2015, Alassane Ouattara avait annoncé en mars qu’il renonçait à une nouvelle candidature, avant de changer d’avis en août, après le décès de son dauphin désigné, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly.
La loi fondamentale ivoirienne prévoit un maximum de deux mandats, mais le Conseil constitutionnel a estimé qu’avec la nouvelle Constitution adoptée en 2016, le compteur des mandats de M. Ouattara a été remis à zéro.
La crainte d’une escalade de violences électorales meurtrières est forte en Côte d’Ivoire, dix ans après la crise post-électorale de 2010-2011, née du refus du président Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite électorale face à Alassane Ouattara.
Survenant après une décennie de tensions qui avaient coupé le pays en deux, sur une ligne identitaire entre le Nord et le Sud, elle avait fait quelque 3.000 morts.