(Tract)- Ils ne sont pas au-devant de la scène, mais font un travail remarquable dans les grandes cérémonies religieuses. Ce sont les hommes de l’ombre : cadreurs, monteurs, ingénieux de son, techniciens, entre autres. A l’occasion de la 122e édition du Gamou de Tivaouane, l’équipe de Emedia a fait une immersion dans le monde de ces «invisibles» pour lever le voile sur le travail des génies du son avec l’équipe de la Hadaratoul Malikiya.
Qui parle de grand événement religieux pense forcément à la sonorisation. Et lors du Gamou de Tivaouane, sans tendre l’oreille, on peut entendre les chants religieux à plus de 5 kilomètres de la Zawiya El Hadji Malick Sy. Derrière ce travail de titan sur fond de décibels se cache une équipe technique rompue à la tâche. Des hommes de l’ombre de la Hadaratul Malikiya qui sont les maîtres de la sonorisation. Jovial, teint clair, habillé en djellaba rouge grena, Doudou Diop affiche le sourire et présente son équipe constituée de jeunes venus de Dakar et Kaolack. Les uns sont habillés en tee-shirt de couleur orangée, d’autres en couleur rouge avec des écritures vertes «Sonorisation Gamou 2023». Dans une autre pièce de la véranda de la Zawiya El Malick Sy, s’ouvre une chambre hyper-climatisée. «C’est pour protéger le matériel que cette pièce est climatisée à fond», explique M. Diop.
Dans l’antre des «invisibles»
La peinture défraichit dans cette pièce qui abrite toute une logistique. De gros baffles, des amplis, des écrans fixés où l’on voit des bandes multicolores, etc. Un jeune de teint noir, un peu chétif, les yeux fixés sur sa table de mixage, avec ses doigts de fée, manie avec dextérité les boutons. Tantôt il les fait monter, tantôt il les fait descendre. «C’est pour moduler le son», informe-t-il sans lever ses yeux. Ainsi, après quelques explications et des anecdotes sur leur travail, place à la sonorisation de la mosquée. C’est un travail d’architecte, puisque rien ne déborde, tout est sécurisé pour éviter l’irréparable. Au moment où le muezzin fait l’appel pour la prière de 17h, le son résonne de partout grâce aux haut-parleurs. Ce qui prouve la puissance de la sono et la qualité du travail des hommes de M. Diop. Le responsable en chef de la sonorisation de Hadaratul Malikiya, renseigne qu’ils font des câblages de 5 à 6 km en partant de la Zawiya.
Et il y’a des câbles venant de la route de Dakar et d’autres venant de Saint-Louis. Sur chaque poteau, ils fixent 3 puissants haut-parleurs. Le travail est énorme, mais Dr Diop peut compter sur ses hommes. Son équipe technique, très qualifiée, est composée seulement d’une quarantaine d’hommes. A la question de savoir si c’est un choix de ne pas mettre une femme, l’homme d’une cinquantaine d’année répond : «Peut-être à l’avenir si nous avons l’aval des autorités religieuses. Parce qu’ici, c’est une place religieuse et nous évitons le mélange des hommes et des femmes. Et même Mame Abdou Aziz ne le voulait pas pendant les prières dans la zawiya. Mais comme le monde évolue, il y’a des femmes qui excellent dans le domaine de la technologie», se justifie-t-il.
Tous des bénévoles engagés pour servir Maodo
Doudou Diop est luimême électricien. Son équipe est composée de plusieurs corps de métier : des électriciens, des ingénieurs de son, des câbleurs, des maintenanciers, etc. «Ce sont tous des bénévoles qui ont laissé leur travail pour venir prêter main forte durant le Gamou et se mettre au service de Maodo et de la Tidjaniyya. Nous commençons à nous installer sur les lieux 5 jours avant le ‘’Burd’’ et nous décampons 2 jours après le Gamou. Notre mission, c’est de satisfaire les pèlerins avec une bonne qualité de son. Et pour une bonne organisation, à l’aide d’un patch, nous donnons du son à toutes les télévisions», explique-t-il.
Pour qu’il n’y ait pas d’interruption, des hommes patrouillent lors du «Burd» ou le jour du Gamou, pour intervenir en cas de problème technique. «Pour éviter des brouillages, des équipes circulent pour vérifier si tous les haut-parleurs fonctionnent. D’autres surveillent l’électricité et vérifient le son. Et nous communiquons 5 sur 5 à l’aide d’un talkie-walkie pour être sur la même longueur d’onde. C’est un travail bien coordonné pour éviter toute faille», renseigne-t-il avec fierté.
Ce travail bien salué par les nombreux fidèles est financé grâce à une solidarité agissante de certains bénévoles. «Nous n’avons pas d’aide de l’Etat. Nous prenons tout en charge. Chacun participe avec ce dont il dispose. Mais il y’a parfois quelques bonnes volontés. Nous gérons trois zones après Tivaouane, cap sur Diacksao et Mbirkilane. Mais c’est avec plaisir que nous finançons avec notre propre matériels, c’est notre Adiya à la nuit du Prophète (SAW)», indiquet-il, avant de préciser qu’ils s’adaptent à la période.
Ainsi, à défaut des baffles qui étaient installées partout, ce sont des hautparleurs qui ont été trouvés pour se protéger de la pluie. «C’est ça l’ingéniosité, c’est être prévenant, parce que d’ici 5 ans, le Gamou se fera en plein hivernage. Et nous, nous avons tout prévu depuis deux ans. C’est pourquoi, même quand il pleut, il y aura toujours du bon son grâce aux haut-parleurs bien sophistiqués. Mieux, ce n’est pas encombrant et ils distillent une bonne sonorisation», confie-t-il. En effet, on parle de sonorisation, mais il y’a tout un tas de matériels des accessoires. «Il y’a une table de mixage pour équilibrer le son. L’ampli qui diffuse làbas, c’est là où on branche les micros des hautparleurs », détaille Doudou Diop. Lui et ses hommes ont mis les bouchées doubles pour donner une bonne qualité de sonorisation au niveau de la Zawiya El Hadji Malick.
«C’est le lieu de rendre hommage à mon équipe, composée de jeunes dégourdis qui suent et travaillent avec amour, sans rien attendre en retour, si ce n’est les bienfaits du Prophète Mohamed (PSL) et de Seydi El Hadji Malick Sy. Car, pour venir ou rentrer à Tivaouane, c’est eux-mêmes qui gèrent leur propre transport», a indiqué M. Diop, les mains sur le cœur pour exprimer son satisfecit. «Nous sommes fiers et contents de faire ce travail qui a été salué par tous et des prières de nos marabouts», conclut-il.
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