Les armées africaines ressemblent à canards boiteux à cause soit de chefs corrompus qui détournent les budgets d’équipements militaires soit à cause d’éléments pas républicains, imbus de communautarisme ou d’intérêts personnels. Les derniers exemples viennent de celles du Niger et de la Côte d’Ivoire. Une plaie qu’il faut soigner dans ce contexte de crise sécuritaire au Sahel.
Le Niger se sépare de son chef d’Etat-major de l’armée de l’air. Une affaire de corruption agite l’appareil sécuritaire. En Côte d’Ivoire, c’est un chef d’escadron qui aurait livré des détails confidentiels à « l’ennemi ».
Au Niger, le changement à la tête de l’Etat-major de l’armée de l’air retient l’attention. Le chef d’Etat-major, Boulama Issa Zana Boukar, a été limogé et remplacé par son adjoint. L’information a été révélée suite à une réunion du Conseil supérieur de la défense, vendredi (22.05.2020).
Aucun détail n’a été donné sur les raisons de ce limogeage. Mais d’après certaines sources, il y aurait un lien avec une affaire de détournement de fonds qui agite le ministère de la Défense depuis plusieurs mois. Une affaire qui relance par ailleurs le débat sur les erreurs au sein des appareils de sécurité qui fragilisent les armées face aux djihadistes.
Le colonel-major Boulama issa Zana Boukar serait impliqué dans l’affaire concernant des surfacturations et des contrats d’achat de matériels tels des hélicoptères, mais qui n’ont jamais été livrés à l’armée nigérienne.
La société civile nigérienne en alerte
Si cela se confirme, c’est la première tête qui tombe en lien avec cette affaire qui a fait perdre à l’Etat environ 100 milliards de francs CFA, soit quelques 15 millions d’euros.
Jusqu’ici, seuls des acteurs de la société civile nigérienne avaient été arrêtés suite à leurs dénonciations.
Parmi eux, Ali Idrissa. Le coordonnateur du Rotab (Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire) réagit au limogeage du chef d’Etat-major, Boulama Issa Zana Boukar en affirmant que « c’est un pas, un signal que le pouvoir a donné ».
Pour Ali Idrissa, la société civile nigérienne ne peut que se réjouir et continuer à suivre ce dossier.
« Et vous n’êtes pas sans savoir que Boulama, en dehors d’être un haut placé dans l’armée nigérienne, est un des très proches du président de la République, par sa famille. Donc si le pouvoir de Niamey accepte de se séparer de Boulama, nous pensons bien que c’est un signal fort », pense le coordonnateur du Rotab.
Les maux qui minent les armées
Des soldats sans motivation qui n’ont pas envie de se battre. Des armées affaiblies par la corruption. Les critiques visant la plupart des armées de la région sont fréquentes.
En Côte d’Ivoire, l’arrestation du chef d’escadron de la gendarmerie de Kong, dans le nord du pays, suscite des interrogations. L’officier aurait livré des informations stratégiques à des forces ennemies en pleine offensive conjointe anti-djihadiste entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso.
Même si le ministère ivoirien de la Défense se réserve de commenter ce sujet, les propos ce week-end du chef de l’armée, Lassina Doumbia, exhortant ses hommes au professionnalisme et à la rigueur, ne sont pas anodins.
Joseph Titi, directeur de publication du quotidien ivoirien « Aujourd’hui » précise que « le chef d’escadron de la gendarmerie de Kong est un ex-rebelle intégré dans l’armée à l’occasion de la formation de la nouvelle armée. La Côte d’Ivoire a eu pas mal de problèmes avec cette armée qui est souvent incontrôlée. Donc, quand le général appelle ses éléments à être plus professionnels, je ne peux pas dire mieux que ce qu’il dit ! »
Offensive militaire fructueuse
Selon le chef de l’armée ivoirienne, ce sont des actions djihadistes survenues à moins de dix kilomètres de la frontière ivoiro-burkinabè qui ont provoqué l’offensive des deux armées.
Une offensive qui aurait abouti à ce jour à l’arrestation d’une trentaine de djihadistes, le décès d’une dizaine d’autres et la saisie de matériels militaires et informatiques ainsi que du matériel roulant.
Tract.sn (avec média)