Tract – Entretien avec Rose-Danielle Ngoumou présidente- fondatrice du Réseau camerounais de recherche sur les Maladies Rares (RCRMR).
Bonjour madame. En quelques mots, présentez-vous.
Je suis sociologue de la santé à l’Université de Yaoundé 1 au Cameroun où je fais une thèse qui porte essentiellement sur la problématique des maladies rares au Cameroun. Je suis très passionnée par la recherche et je suis d’ailleurs auteure de nombreux articles scientifiques et des chapitres d’ouvrages. Par moment aussi je dispense des cours de sciences sociales et humaines appliquées aux sciences de la santé et la santé publique dans des instituts de formations professionnelles et de l’enseignement supérieure. J’adore les voyages, la lecture, écouter de la musique et je suis ouvertes aux nouvelles expériences.
C’est quoi le Réseau Camerounais de Recherche sur les Maladies Rares ?
Le Réseau camerounais de recherche sur les Maladies Rares (RCRMR) est une association qui a pour vocation de faire la recherche afin de produire des données sur les maladies rares pouvant être traduites en actions, de mener divers plaidoyer pour aménager la qualité de vie des personnes souffrant de maladies rares et leurs familles et sensibiliser et éduquer la population générale sur les maladies rares afin briser les mythes et croyances non fondées sur ces pathologies qui sont de nature à hypothéquer les droits des malades et leurs familles dans la participation à la vie sociale. C’est cette ambition qui justifie le fait qu’au sein du Réseau camerounais de recherche sur les Maladies Rares, l’équipe est pluridisciplinaire, vous avez des spécialistes des sciences sociales et humaines, des spécialistes de la santé publique, des spécialistes des sciences médicales et biomédicales, du droit et de la communication, etc. L’action doit être collective pour impulser un changement durable et ressortir tous les différents aspects sur lesquels il faut nécessairement agir.
Pourquoi le Réseau Camerounais de Recherche sur les Maladies Rares ?
Le Réseau camerounais de recherche sur les Maladies Rares est motivé par la volonté de créer de la visibilité sur un phénomène « silencieux » mais présent dans les familles et dont les répercussions rompent les liens et contrats sociaux pourtant nécessaire à une bonne cohésion sociale. L’absence de politiques encadrant la gestion de ces évènements de santé et surtout des données probantes sur la réelle situation des maladies rares au Cameroun en termes de répartition géographique, de profil épidémiologique par exemple justifie d’une part la mise sur pied du Réseau camerounais de recherche sur les Maladies Rares. D’autre part la méconnaissance de ces pathologies qui alimente de nombreuses violences dans les familles en est aussi une motivation.
Parlez-nous de quelques activités déjà menées par le Réseau Camerounais de Recherche sur les Maladies Rares
Le Réseau camerounais de recherche sur les Maladies Rares est encore tres jeune mais à ce jour nous avons pu réaliser un certain nombre d’activités et certaines en cours de réalisation. Pour ce que nous avons déjà fait, en novembre 2022 nous avons tenu un atelier de discussion sur thème : « Les maladies rares au Cameroun : Quel plaidoyer ? ». Cet atelier s’est tenu à la salle des conférences du ministère de la Recherche Scientifique et de l’Innovation. Nous avons enregistré la participation d’universitaires (enseignants, chercheurs et étudiants), les cadres du ministère de la santé publique, les cadres du Centre National d’Education/MINRESI, les représentants des associations de malades et les hommes de presse. Au cours dudit atelier nous avons engagé des discussions sur la problématique des maladies rares au Cameroun afin de construire un outil de plaidoyer en faveur de la promotion de la santé des personnes atteintes des maladies rares. Nous avons aussi conçu deux bandes dessinées éducatives sur les maladies rares. Une est conçue pour les enfants et s’inscrit aussi dans la promotion de l’inclusion des personnes porteuse de maladies rares en milieu scolaire. La deuxième quant à elle, est conçue pour les jeunes et adolescents. Ces bandes dessinées seront distribuées dans les écoles, collèges et lycées gratuitement pour vulgariser les connaissances sur ces pathologies auprès de nos différentes cibles. En février dernier nous avons organisé deux webinaires sur le theme : « Rendre rare visible, faire briller les maladies rares » pour commémorer la célébration de la Journée International des maladies rares qui se célèbre tous les févriers à la fin du mois. Nous avons questionné la place qu’occupent les maladies rares dans les plans stratégiques de santé au Cameroun et leurs référentiels. En mars nous avons lancé le concours de production littéraire dans les collèges et lycées de l’enseignement general à Yaoundé. il était question pour les élèves de rédiger soit une dissertation ou un poème de 300 à 500 mots sur le theme : « l’inclusion sociale des personnes souffrant de maladies rares et/ou en situation de handicap : une affaire de tous ». Les élèves devaient faire un plaidoyer pour qu’un enfant atteint d’une maladie rare et/ou d’un handicap en age scolaire soit admis dans son établissement.
Comment évaluez-vous l’impact des actions et des activités de votre organisation face aux réchauffements climatiques ?
Le réchauffement climatique est désormais un phénomène qui s’impose à nous. Nos actions nous ont menées à cette situation de crise. Les maladies rares sont des pathologies qui se caractérisent par leur très grande complexité. En réalité pour certaines les causes sont inconnues mais de nombreuses hypothèses sont avancées parmi lesquelles la qualité de l’environnement dans lequel une gestante ou un individu vit. Le Réseau camerounais de recherche sur les Maladies Rares pourrait dans un futur proche axer ses activités de promotion d’un environnement sain et les inclure comme priorité dans ses activités de promotion de la santé et prevention des maladies rares.
Qu’attendez-vous du futur des politiques et des pratiques dans le domaine médical en Afrique ?
La prise en compte des maladies rares dans l’applicabilité des politiques sociales et sanitaires à travers leur integration dans les plans stratégiques de santé par exemple. Il est urgent que l’on sorte du conformisme rigoureux qui voudrait qu’en santé publique on ne statut que sur des pathologies qui ont de très fortes prévalence. Une maladie rare peut aussi toucher de nombreuses personnes mais s’il n’existe pas une cadre qui règlemente et encadre l’identification et la prise en charge des cas, il sera très difficile pour les systèmes de santé africain d’innover. Surtout que j’ai la conviction que certaines maladies rares demeurent rares parce qu’elles sont stigmatisantes du fait des altérations physiques et /ou mentales qu’elles causent chez le malade. Ces atteintes font basculer ces personnes dans la catégorie des personnes marginales et les oblige à vivre cachées et isolées.
Propos recueilli par Baltazar AATANGANA
(noahatango@yahoo.ca )