Tract-Entretien avec Loulou Said Issilamou,Coordinatrice nationale communication à l’ONG Earthecho communication auprès du projet SHAWIRI (Solution).
Présentez-vous en quelques mots à nos lecteurs.
Je m’appelle Loulou Said Issilamou. Comorienne. Mariée et mère de 03 enfants. Experte en Communication. Diplômée en Sciences de l’information et de la communication au Centre d’Etudes des Sciences et Techniques de l’Information, à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Je suis actuellement Coordinatrice nationale de communication à l’ONG EarthEcho Communications auprès du projet SHAWIRI (Solution). Un projet qui vise le renforcement de la protection et de la participation des femmes, jeunes et de la société civile en Union des Comores. J’ai 20 ans d’expériences aussi bien en communication qu’en protection sociale dont la promotion du genre, auprès de certains partenaires publics au développement tels que le Système des Nations, l’Union Européenne et la Commission de l’Océan Indien.
Vous travaillez chez Earthecho communication. Une organisation internationale dont l’engagement en faveur des droits des femmes en Afrique en particulier, et dans le monde en général, est remarquable tant sur le terrain que sur les plateformes digitales et même à travers de grands rendez-vous (colloques, séminaires , etc.). Selon vous, que reste-t-il à faire aujourd’hui dans la lutte pour les droits des femmes dans le monde ? Quelles sont les priorités aujourd’hui ?
A mon humble avis, les priorités se situent à trois niveaux.
D’abord, le niveau systémique où il est nécessaire de renforcer les législations relatives aux droits de la femme, tout en menant le plaidoyer auprès des hautes autorités pour plus d’alignement des législations nationales aux traités et conventions régionaux et internationaux. En outre, il serait plus stratégique de mener des plaidoyers auprès des Etats, notamment auprès des Assemblées nationales pour plus de lois de finances sensibles au genre. Ensuite, au niveau institutionnel, mettre l’accent sur le renforcement des capacités techniques et opérationnelles des institutions étatiques en charge de la promotion de l’égalité et de l’équite de genre et des Organisations de la société civile impliquées dans la problématique de l’égalité des sexes. A ce niveau, un focus devrait être porté sur les institutions en charge de l’emploi féminin et la participation des femmes dans les instances de prise de décision, notamment la participation politique. Par ailleurs, la sensibilisation des institutions religieuses est nécessaire pour toucher davantage les milieux conservateurs des pays, à l’instar des mouftorats/conseils des oulémas pour les pays musulmans et des synagogues et églises pour les pays judéo-chrétiens. Enfin, au niveau individuel, il est important de déployer des programmes ambitieux au bénéfice du renforcement des capacités techniques des filles et des femmes, pour plus d’émancipation et d’autonomie.
Quelle est la place de la société civile dans ces avancements à venir ?
En tant qu’entité de contrepouvoir, la société civile pourrait être à l’origine des mutations vertueuses pour les changements et transformations à venir en faveur de l’égalité homme/femme. Ceci pourrait se traduire par des actions militantes pour plus de législations et de textes qui promeuvent l’égalité de genre. Aussi, la société civile pourrait jouer un rôle d’arbitrage entre les milieux conservateurs, les élus et les pouvoirs exécutifs, dans la perspective de dissiper les préjugés, les clichés sociaux et atténuer ainsi les
pesanteurs socioculturelles qui impactent encore aujourd’hui les rapports homme-femme dans nos sociétés.
Quels sont les actions concrètes de Earthecho communication à travers le monde en faveur de l’autonomisation des femmes et des jeunes filles, sans oublier les personnes vivant avec un handicap ?
EarthEcho ne cesse de mener depuis sa mise en œuvre en 2020, des Campagnes de communication pour le changement social et comportemental (SBCC) visant à transformer durablement les préjugés, normes, pratiques et attitudes défavorables aux femmes, aux jeunes, et aux personnes en situation de handicap, en impliquant les leaders religieux, communautaires et émergents. Pour ce faire, cette ONG espagnole actuellement sur le terrain, entre autres, à Madagascar et aux Comores, a développé une série d’outils de communication et de visibilité telles que des vidéos animées, des bandes dessinées, des affiches et tout autre type de supportinnovant et engageant visant le changement de comportement non seulement contre les Violences basées sur le Genre et la participation des femmes dans les instances de prise de décision, mais aussi en faveur des jeunes et des handicapés. Aussi, elle mène des activités d’éducation civique et d’émancipationau profit des filles en milieu scolaire et universitaire, les préparant à devenir les leaders de demain et à revendiquer leurs droits
Pensez-vous que les femmes puissent changer le monde ?
Question complexe. Les changements attendus en termes d’égalité de sexe ne pourront être l’émanation d’un seul sexe. Ces transformations ne peuvent êtreperçues qu’au travers l’engagement effectif des femmes et des hommes. Bref, le principe d’égalité des sexes n’a pas vocation à promouvoir le pouvoir de l’un sur l’autre. D’un point de vue philosophiqueet sociologique, c’est l’égalité en termes de droit. Etles changements transformationnels des sociétés ne pourront donc s’opérer que sur le terrain de la complémentarité et de l’entente mutuelle.
Personnellement, quels sont vos engagements actuels et futurs en faveur des droits des femmes dans le monde ?
Personnellement, je voudrais contribuer, dans la mesure du possible, à briser le silence qui existe surtout par rapport aux Violences basées sur legenre ; avec un accent particulier sur la violence psychologique devenue de plus en plus récurrente,mais qui reste impunie et pourtant, elle tue à petit feu. Pour ce faire, en ma qualité d’Experte en communication, je compte poursuivre aux côtés d’EarthEcho Communications, mes activités de sensibilisation contre ce fléau, tout en œuvrant également pour une participation active et accrue des femmes dans les instances de prise de décision.
Votre mot pour les jeunes filles et les femmes du monde entier qui vivent dans les conditions de marginalisation et de vulnérabilité face aux injustices diverses (climatiques, politiques, sécurité etc.)
Nous vivons dans un monde de plus en plus marqué par des conflits armés, les effets de changement climatique, avec leurs lots de déplacés et de réfugiés. Dans ces moments difficiles, très souvent, des filles et des femmes font face à des injustices et des sévices de toute sorte. Dans ce type de situation, il est important de rappeler et de faire le plaidoyer pour la mise en œuvre stricte des traités et conventions internationaux qui protègent les filles et les femmes, notamment la Résolution 1325 du conseil des sécurité de l’ONU sur les femmes.
Propos recueillis par Baltazar ATANGANA