Tract – Il y a un peu plus d’un an, l’impulsion des Patriotes au pouvoir. Durant trois, quatre années des batailles ont éclaté çà et là jusqu’à pertes de vies humaines pour extraire Macky Sall et ses «marrons du feu» du perchoir pouvoiriste. Et au crépuscule d’un deuxième mandat ‘Sallement’ têtu, les populations se sont propulsées en un seul souffle de scrutin, un nouveau vent de changement selon la position adoptée, voulue ou imposée dans la barque Sunugaal. La majorité avait voté et scandé: ‘Diomaye mooy Sonko’
C’était plutôt l’apothéose. De ces millions de jeunes trappeurs politiques, grands batteurs de casseroles, l’espoir d’une vie meilleure vibrant au rythme de ces ustensiles de cuisine pour faire faire bouillir la marmite pétille dans leurs yeux, illumine leur être. Ils se sont battus des années durant avec détermination et, à peine quelques mois après la prise de fonction du tandem ‘Diomaye mooy Sonko’, les voilà qui se lassent parce que ‘dara doxul’, rien ne marche. Et pourtant, ils sont d’accord que l’on fasse autrement avec la nouvelle ‘bonbonne gouvernance’ mise en place. Ils étaient d’accord pour ce… temps mort.
Le temps de mettre l’ordre dans notre espace commun, faire le ménage, désinfecter la cuisine, laver bols, assiettes, tasses et autres casseroles, mettre les ustensiles à l’endroit, faire du ‘tann céeb’ parce que le riz est encore bourré de cailloux des manifs, vérifier le gaz – heureusement trouvé entre Sangomar et Mauritanie– pour qu’il flambe au meilleur de son exploitation et encore… L’on trouve que les zones – entre la Présidence, les ministères et directions et services de l’état – sont hantées, il faut les désenvoûter. Des bruits fusent, cris de possédés, clameurs de ceux qui possédaient et détenaient le pouvoir. N’est-ce donc pas là le coup de gong de la reddition des comptes, ou le coup de balai crissant une chasse aux sorcières ? Alors, certaines personnes ne dorment plus du sommeil de juste depuis qu’on a soufflé dans la trompette pour annoncer l’heure de l’exorcisme. D’abord, un répertoire de gabegie et d’injustices à combattre est déclamé pour ramener l’ordre politico-social dans la cité. Plutôt s’agit-il là du seul hic économique sénégalais à débrouiller si l’on suit affirmation du Premier ministre Ousmane Sonko à la veille du dialogue national version 2025.
Aux premières lueurs du pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye, la situation économique malaisée infligeait déjà une manne de désagréments aux foyers sénégalais. Entre deux embarcations de candidats à l’immigration constamment habités par le désespoir de leur quotidien de vie de ‘sunugalériens’, la traque est lancée contre les ‘spéculateurs fonciers’, les détourneurs de deniers publics, les mauvais payeurs d’impôt avec une vigoureuse et maladroite indexation de la presse grande râleuse devant l’Éternel. Les entreprises dans le dur béton étouffent et battent de l’aile, l’espace de la com’ et de l’info démuni et essoufflé rit jaune pendant que dans les réseaux on s’en pourlèche les babines. Les populations embrouillées, seule tasse de thé à la main, rêvent de lendemains meilleurs. Il n’y a même plus ‘ataya’ à gogo et pourtant le président de la 15e législature, El Malick Ndiaye passe commande de belles bagnoles pour tous les nouveaux locataires de l’Assemblée nationale. M. Ndiaye se justifie. Tout le monde n’est pas tenu de le comprendre quand son ‘céebu jënn’ est concocté Penda Mbaye à grand-peine. Parce que le poisson qui rend délicieux ce plat national s’est fait rare le long de nos côtes plus fréquentées aujourd’hui par les pirogues convoyeuses d’immigrés. Sur ce registre, les pêcheurs sont les premiers clients des convois ‘Barça walla Barsaq’, victimes qu’ils sont de la tempête de désordre soupirant dans le secteur qui les faisait vivre. Le flot continue de gronder entêté, l’écume se déverse sur les rives mélancoliques et cadavéreuses. Malgré les efforts et la volonté des nouvelles autorités, il y a toujours des candidats maladivement obstinés qui passent entre les mailles du filet.
Ce filet qui ne peut même plus prendre finalement de produits de mer est plutôt déployé sur la terre ferme, entre les directions et les ministères, pour prendre d’autres gros poissons sauriens fonctionnaires spécialisés dans le pompage des ressources de la Nation. Et voilà que la traque des biens mal acquis se poursuit en pleine république où les milliards subtilisés réintègrent en compte-gouttes les caisses de l’état. Pendant ce temps, à travers la rue publique, l’argent se raréfie. Les investisseurs sont sur le qui-vive, les drapelets des ombrageux affairistes et téméraires dealers sont en berne, l’argent sale a du mal à se faire une beauté dans l’immobilier, ou dans les réjouissances familiales et communautaires. La Banque mondiale, le Fmi à qui l’on a transmis les ‘états financiers truqués’ du régime précédent, écarquillent les yeux, et la direction de la Banque africaine de développement (Bad) nous glisse entre les mains comme mérou pour frétiller, sur l’autre rive du fleuve Sénégal, dans la nasse de nos frères mauritaniens.
Tout compte fait, il faut dire que la continuité dans la rupture, ou la rupture dans la continuité vaut de grands aménagements. Quand on opte pour le grand ménage d’un pays tel que décrit, c’est à grande eau qu’il faut le faire. Il faut accepter de se retrousser les manches, savoir être patient avec cette team en train de trouver ses marques, d’étoffer ses carnets d’adresse, de faire des efforts diplomatiques en ânonnant, de chercher enfin les finances pour appuyer son Projet.
Les nouvelles autorités ont bien promis, depuis le temps encore brûlant passé dans l’opposition, que rien ne sera plus comme avant. Que le Sénégal sera souverainiste, jaloux de son indépendance s’éternisant véritablement à se départir du joug néocolonialiste en train de lâcher prise, sans plus de bases de cette Françafrique mise en place par… de Gaulle. Et depuis, il faut comprendre que l’autonomie est un long chemin nécessitant du courage, de la privation, de l’abnégation mais surtout de la diplomatie et de la sagesse.
Par Cheikh Tidiane COLY Al Makhtoum